Tout comme Black Myth Wukong en 2024, Wuchang Fallen Feathers va miser sur l’héritage historique offert par ses origines, et plus précisément sur la Chine antique où se déroule son histoire. Nous sommes à la fin du XVIIème siècle, en pleine dynastie Ming dans la région du Sichuan, une époque de profonds bouleversements et de mutations décisives, marquée notamment par l’ouverture progressive au commerce avec les puissances européennes, l’introduction des premières armes à feu, mais aussi par une détérioration dramatique des conditions de vie : famine généralisée, instabilité politique, et surtout, la propagation inexorable de la Grande Peste. C’est dans ce contexte déjà troublé qu’apparaît l’Ornithropie, une maladie mystérieuse et incurable, qui constitue l’un des éléments centraux du jeu. Ce mal insidieux, dont les premiers signes se manifestent par l’apparition de plumes bleues sur le corps, affecte profondément le personnage principal, Wuchang, dont le bras gauche porte les stigmates visibles de l’infection.
Mais ces modifications corporelles ne sont que les prémices d’un processus bien plus tragique : la maladie s’accompagne en effet d’une perte progressive de la mémoire, mais aussi d’une dégradation mentale qui mène à la folie, voire à une transformation totale en une créature monstrueuse. C’est avec ce dérèglement de l’identité que Wuchang va tenter de retrouver sa mémoire, mais aussi une soeur dont elle a perdu la trace aux alentours du Havre Sacré, là où elle a été retrouvée inerte. L’histoire assez basique dans sa proposition va cependant trouver une narration bien plus captivante que les jeux de FromSoftware, bien trop cryptiques à mon goût, avec des personnages qu’on va croiser au fil de notre voyage. Mieux, en fonction de vos choix d’aider ou pas certains d’entre eux, il ne sera pas rare qu’ils débarquent à l’improviste pour nous filer un coup de pouce, ou pour débloquer un chemin inaccessible ou caché. D’ailleurs, à ce propos, le jeu propose plusieurs embranchements narratifs qui vont avoir un impact sur la fin du jeu, car oui, il y a littéralement plusieurs fins disponibles selon les actions que vous allez entreprendre avec certains PNJ croisés sur votre route. Et ça, c’est plutôt cool et assez inattendu.
COLORE MES VEINES
Autre élément qui va surprendre pas mal de monde avec Wuchang Fallen Feathers, c’est sa direction artistique colorée, lumineuse et qui tranche radicalement avec ce que les Souls-like nous proposent habituellement. Si vous en avez marre de ces univers sombres, désolés, tout gris et un peu déprimants, Wuchang Fallen Feathers va vous enchanter et surtout vous en mettre plein la vue, car soyons honnêtes, le jeu brille par ses graphismes vraiment saisissants. Le studio chinois Leenzee a fait le bon choix de l’Unreal Engine 5 et peut ainsi proposer une technique vraiment solide, avec plusieurs options de paramétrage, même sur consoles qui permet d’augmenter ou de diminuer le nombre d’images par seconde, ou de favoriser le rendu visuel, c’est au choix. Et puis, comme Wuchang Fallen Feathers veut aussi faire honneur à sa propre culture chinoise, le jeu ne lésine pas sur les paysages magnifiques à regarder, avec des Bouddhas géants à flanc de falaise ou taillés dans la roche, des arbres majestueux en plein crépuscule laissant entrevoir les rayons de lumière de la pleine Lune, les panoramas sublimes à regarder en hauteur, sans compter que le jeu propose une très grande variété d’environnements différents. Forêt luxuriante, village et forteresse enneigés, zone boisée ambiance automnale, lac illuminé par un coucher de soleil, sans oublier des lieux plus reculés avec des ambiance plus cryptiques, on reste évidemment dans un Souls-like, mais quoiqu’il arrive, vous allez vraiment être stupéfait par la partie graphique.
ll y a cependant un aspect sur lequel on n’attendait pas Wuchang Fallen Feathers aussi brillant, c’est son level design, bourré de chemins alternatifs et de raccourcis bien pratiques, qui nous sauvent souvent la mise lors de certaines situations. De base, la structure du jeu est plutôt linéaire dans son ensemble, mais avec tous ces embranchements et ces boucles qui finissent toujours par se recroiser, on se rend compte qu’il y a plusieurs façons d’avancer dans son aventure. Alors oui, les environnements étant très riches et très fournis, certains trouveront ça plutôt labyrinthique, mais en se fiant aux différents éléments du décor, on retrouve aussitôt son chemin. Attention tout de même, car les développeurs ont également placé de nombreux pièges qui peuvent littéralement surprendre et vous abattre en un rien de temps, et provoquer des excès de colère. Heureusement, il suffit de fouiner un peu pour trouver un autel pour sauvegarder, panser ses blessures et recharger ses fioles avant de repartir se faire dérouiller. Oui, ces autels sont l’équivalent des feux de camp dans les jeux de FromSoftware.
L’ÉLÈVE VEUT DÉPASSER LE MAÎTRE
Pour le moment, Wuchang Fallen Feathers fait figure de très bon élève et il va d’ailleurs monter davantage dans mon estime en ce qui concerne son gameplay. Ce qu’il faut savoir, c’est que le titre de Leenzee assume pleinement ses influences et reprend les bases bien établies des Souls-like habituels. On retrouve la formule classique avec attaque rapide peu puissante, frappe lourde plus lente mais qui génère masse de dégâts et qu’on peut aussi charger pour réaliser une 2ème attaque encore plus spectaculaire, la possibilité de faire des esquives et une barre d’endurance qu’il va falloir surveiller si vous n’avez pas envie de vous faire dépasser par les événements. Bien sûr, au fil de l’aventure, vous allez pouvoir augmenter tout cela, sachant qu’en plus de l’esquive, il est possible de parer les attaques ennemies, mais en fonction de l’arme qu’on a en sa possession. Cela dit, même si vous parez, vous perdez de l’énergie, donc l’esquive reste évidemment la meilleure des options d’autant que le jeu intègre un système d’esquives parfaites, appelées ici “Miroitement” et qui permet d’accéder à d’autres attaques liées au pouvoir céleste. Et c’est là où Wuchang Fallen Feathers tire son épingle du jeu et introduit ses propres mécaniques et insuffle son identité.
Rappelez-vous, je vous ai parlé de cette maladie, l’ornithropie, cette étrange maladie qui affecte notre héroïne. Ce n’est pas seulement un élément narratif dans le jeu, c’est également un aspect essentiel du gameplay, et c’est même la pièce-maîtresse du système de combat. En fait, cette ornithropie introduit un système original, qui est la Puissance Céleste, une ressource représentée par des plumes situées en bas à gauche de l’écran, sur la silhouette de notre héroïne. Chaque plume équivaut à un cumul de puissance, utilisé dans plusieurs mécaniques : les sorts, les compétences d’armes, le dégainage rapide puisque Bai Wuchang peut porter 2 types d’armes à la fois avec la possibilité d’en changer comme elle l’entend et les attaques lourdes instantanées, qui n’ont pas besoin d’être chargées pendant 3 secondes, le temps où vous êtes vulnérable. Au départ, on démarre avec une seule plume, mais bien sûr, il est possible de les débloquer en passant par l’arbre de compétences. C’est évidemment lorsque la Puissance Céleste est disponible qu’on réalise le maximum de dégâts chez l’adversaire, le tout avec évidemment une mise en scène spectaculaire et qui change selon l’arme qu’on a en main. A noter que pour gagner de la Puissance Céleste, on peut enchaîner les esquives parfaites, faire des combos, ou en utilisant des consommables.
SE FAIRE PLUMER
Autrement, comme tout Souls-like qui se respecte, Wuchang Fallen Feathers propose un système d’XP, appelé ici Mercure Rouge, et qu’on obtient en terrassant des ennemis, en vendant des objets ou en utilisant certains consommables. Plus vous allez monter en compétences et plus Bai Wuchang va devenir plus performante, mais attention, le jeu prend aussi en compte la notion de folie, générée par cette Ornithropie et qui est représentée in-game par une jauge dans le menu personnage et qui évolue selon vos actions. Par exemple, en tuant des humains, vous augmentez votre folie, comme le fait de mourir aussi. Plus votre folie est haute et plus vous infligez des dégâts, c’est cool, mais en contre-partie, si jamais vous canez, vous perdez plus d’XP en mourant. Et le pire, c’est que si jamais votre niveau de folie est au maximum, lorsque vous ressuscitez, vous êtes alors pourchassé par votre démon intérieur qu’il va falloir affronter pour récupérer votre XP.
Mais ce n’est pas tout, le jeu de Leenzee se distingue aussi par son choix de limiter le nombre d’armes. Il n’y a que 5 catégories d’armes au total : Épée longue, épée à une main, double-lames, lances et hâche, sachant que chaque arme propose ses avantages et ses inconvénients au combat, mais dispose aussi d’une compétence signature fixe, et d’une compétence interchangeable dans son arbre de compétences. A cela, il est possible d’infuser avec un effet élémentaire afin d’augmenter la puissance de l’arme. Bref, ce sont tous ces petits ajouts ici et là qui confèrent à Wuchang Fallen Feathers son identité unique. Le joueur peut aussi équiper jusqu’à quatre sorts simultanément, qu’on peut évidemment interchanger, sachant que ces sorts consomment de la puissance céleste. Et mine de rien, avec ces sorts de magie qui s'ajoutent à un système déjà bien complet, on se retrouve à pouvoir réaliser des attaques particulièrement fluides et et dynamiques qui nous ont rappelé Black Muyth Wukong par moments. Et puis, il y a une vraie marge de progression durant tout le jeu, qui permet de constater que notre jeu du début de l’aventure n’est plus le même après 40h de dur labeur. A noter que Wuchang Fallen Feathers est un jeu assez ardu et qui vous fera ragequit plus d’une fois. Je dirai même que le jeu est plus difficile que Black Myth Wukong si on voulait comparer.