La première étape de notre comparatif portera sur les graphismes. Dans mon test de Ghost of Yotei, j’évoquais déjà que, sur le plan visuel, Assassin’s Creed Shadows semblait supérieur à Ghost of Yotei. Aujourd’hui, je vais vous démontrer que cet écart est loin d’être anecdotique. On peut même aller jusqu’à affirmer que Assassin’s Creed Shadows inflige une véritable leçon à Yotei, dont le moteur graphique peine à évoluer. Il suffit d’observer les textures pour constater le soin apporté par les équipes d’Ubisoft, nettement supérieur à celui de Sucker Punch. Chaque élément du monde ouvert de Assassin’s Creed Shadows témoigne d’un travail d’orfèvre : la mousse qui recouvre les rochers, la variété des matériaux composant les chemins et sols, les racines des arbres qui percent le terrain… et même la manière dont sont agencées certaines structures et bâtiments. Les murs de pierre, par exemple, ne présentent aucune symétrie, aucune répétition : chaque pierre semble posée à la main. On peut également apprécier la patine du temps sur certains éléments, comme les Torii, qui donnent l’impression d’exister depuis des millénaires. Les planches de bois, quant à elles, affichent un réalisme saisissant : elles ne sont jamais parfaitement droites, présentent fissures et imperfections, et certaines barrières laissent même tomber une planche au sol. J’ai déjà eu cette sensation avec Red Dead Redemption 2, mais je n’avais pas ressenti une telle immersion graphique dans un open world depuis longtemps. Je vous invite à comparer les deux titres par vous-mêmes : Assassin’s Creed Shadows apparaît clairement plus raffiné, plus détaillé et plus réaliste que Ghost of Yotei. Et cela va au-delà de la simple esthétique : les interactions entre le personnage et l’environnement dans Shadows sont bien plus poussées, là où Ghost of Yotei reste relativement limité.


GRAPHISMES OU DIRECTION ARTISTIQUE
Heureusement, Ghost of Yotei se défend également assez bien, même si l’on constate moins d’attention au détail. Les textures sont moins riches, plus simplistes, et l’ensemble de l’open world dégage moins de cohésion réaliste. À l’instar de Ghost of Tsushima à son époque, Yotei mise avant tout sur une puissance iconographique. Sucker Punch cherche à frapper l’œil avec des éléments visuels forts, parfois même surréalistes. Si l’on examine attentivement, sur le plan visuel, Ghost of Yotei reste proche de Ghost of Tsushima, rappelons-le jeu PS4. Même si Yotei parvient à éblouir, c’est davantage grâce à sa direction artistique et à sa vision idéalisée du Japon féodal, quitte à s’affranchir de certaines lois naturelles. Des érables aux feuillages écarlates dressés sur des montagnes balayées par un blizzard à –10 °C ne sont évidemment pas réalistes. Mais Sucker Punch en est conscient : l’objectif n’est pas la stricte véracité climatique, mais la création de paysages marqués et contrastés, où chaque choix chromatique capte le regard et stimule l’imaginaire. Et le résultat est indéniablement réussi ; on pourrait même affirmer que cela fonctionne mieux dans le cadre d’un jeu vidéo. Grâce à ces marqueurs visuels puissants, certaines zones du monde de Yotei se distinguent immédiatement, facilitant l’orientation sur la carte, un atout qui fait défaut à Assassin’s Creed Shadows. Ce dernier, en cherchant un réalisme extrême et une richesse environnementale poussée, tend à perdre le joueur dans des zones trop similaires entre elles. Cette impression m’a frappé lorsque j’ai relancé Shadows après avoir terminé Ghost of Yotei. Ainsi, même si Assassin’s Creed Shadows surpasse Yotei sur le plan technique, il faut bien reconnaître que la direction artistique de ce dernier laisse une impression durable et frappe l’imaginaire avec une efficacité remarquable.
En revanche, Assassin’s Creed Shadows surpasse nettement Ghost of Yotei dans la gestion du climat et des effets météorologiques, qui apparaissent ici beaucoup plus réalistes, cohérents et impressionnants. Dans le jeu d’Ubisoft, on observe l’arrivée de la pluie de manière progressive : le ciel s’assombrit, les nuages se densifient, le vent se lève et soudain, le déluge commence. À l’inverse, dans Ghost of Yotei, ces transitions sont quasi inexistantes ou très limitées : la pluie tombe brutalement, sans aucune préparation visuelle. Un constat similaire peut être dressé pour le cycle jour-nuit. Dans Yotei, il n’est pas rare de passer d’un après-midi ensoleillé à un crépuscule sans prévenir, ce qui rompt instantanément l’immersion. On observe par ailleurs un paradoxe intrigant dans Ghost of Yotei. Lorsque la caméra est rapprochée du personnage, le jeu offre une expérience digne d’une production nouvelle génération. Mais dès que l’on prend du recul, un léger effet de rétrogradation visuelle se fait sentir. Il est difficile de l’expliquer précisément, mais l’impression qui se dégage est nette : l’univers perd en finesse et en cohérence lorsque l’on s’éloigne de l’action.

ANIMATIONS 2025 OU ANIMATIONS 2015 ?
En ce qui concerne les animations, il est inutile de s’attarder longtemps sur le sujet : le constat est sans appel. Assassin’s Creed Shadows écrase Ghost of Yotei de manière incontestable, tant pour les personnages principaux que pour les PNJ. Le travail fourni par Ubisoft sur ce plan est bien supérieur à celui de Sucker Punch, qui n’a fait que réutiliser les animations déjà présentes dans Ghost of Tsushima. Déjà en 2020, ces dernières commençaient à montrer leurs limites. Il suffit de regarder la gestion de l’escalade dans Yotei pour constater à quel point ces animations ont vieilli. Si un troisième épisode devait voir le jour, il serait indispensable de corriger cet aspect, sous peine de se heurter à une critique encore plus sévère. En revanche, sur le plan équestre, Ghost of Yotei reprend l’avantage. Les animations du cheval et surtout la jouabilité offrent une expérience beaucoup plus immersive et grisante que celles des montures de Shadows, qui paraissent parfois trop rigides et manquent de rapidité. Le cheval d’Assassin’s Creed Shadows reste néanmoins très performant : il peut traverser les zones boisées sans difficulté, s’aventurer dans les eaux profondes et même nager. Celui de Yotei, en revanche, bute contre les obstacles aquatiques et ne peut franchir certains points d’eau, ce qui nuit clairement à la fluidité de l’expérience.

COMBATS FLUIDES OU AFFRONTEMENTS FIGÉS
Abordons maintenant le système de combat, et sur ce point, Ghost of Yotei se distingue par sa nervosité et, surtout, sa fluidité. Les deux jeux reposent sur un système de gestion des armes similaire, mais Yotei offre un ressenti beaucoup plus réactif. Les ennemis y sont plus coriaces, attaquent en nombre de manière plus efficace, et les sensations de combat avec Astu (ou avec Jin Sakai à l’époque) sont particulièrement convaincantes. À l’inverse, le système de combat d’Assassin’s Creed Shadows souffre de certaines rigidités. L’idée de séparer les deux personnages avec des aptitudes distinctes s’avère problématique : elle fige certaines actions, casse le rythme, et le changement de personnage peut prendre un temps considérable, voire être impossible dans certaines situations. En matière de fluidité, Ghost of Yotei prend également l’avantage grâce à ses temps de chargement réduits. Comme je l’avais souligné dans mon test, les voyages rapides dans son open world sont presque instantanés, ce qui rend l’action beaucoup plus dynamique. De plus, la navigation sur la carte est plus intuitive et efficace : les éléments sont mieux mis en valeur, et l’on s’oriente de manière quasi instinctive, un contraste frappant avec Assassin’s Creed Shadows, qui, malgré des progrès par rapport aux épisodes précédents, reste moins clair et moins pratique face à la concurrence.

INTELLIGENCE TRÈS ARTIFICIELLE ?
Il reste un dernier point à aborder : l’intelligence artificielle, un sujet complexe et récurrent dans les discussions, car il représente l’un des aspects les plus délicats à développer dans un jeu vidéo. Non seulement elle demande du temps, de l’énergie et une équipe conséquente, mais il faut également trouver le juste équilibre pour ne pas frustrer le joueur. Le dernier jeu à proposer une IA exceptionnelle reste The Last of Us 2, un modèle difficilement égalable. Celle d’Assassin’s Creed Shadows est plutôt correcte, surtout comparée aux dernières productions d’Ubisoft, dont certaines présentaient des IA complètement inefficaces. Les gardes réagissent bien aux stimuli, viennent fouiller au moindre bruit, et obligent le joueur à s’adapter à leur comportement. En revanche, Ghost of Yotei se contente de reprendre les principes de Ghost of Tsushima, avec des incohérences surprenantes pour un jeu aussi ambitieux. Lorsqu’on se fait repérer, malgré l’alerte signalée par un coup de corne, seule une partie des ennemis se déplace ; les autres restent figés sur place. De manière similaire, certains ne semblent même pas remarquer un acolyte agonisant à quelques mètres. Les archers, dont la vision devrait être redoutable, ne préviennent pas leurs partenaires avant de tirer, ce qui crée des situations déséquilibrées et peu crédibles. Au final, le contraste est flagrant : l’I.A. d’Assassin’s Creed Shadows se montre réactive et immersive, tandis que celle de Ghost of Yotei laisse apparaître des lacunes importantes, parfois au détriment de l’expérience de jeu.

ALORS, QUI MET UNE FESSÉE À L'AUTRE ?
Au final, il est difficile de désigner un vainqueur absolu entre Ghost of Yotei et Assassin’s Creed Shadows, tant ces deux titres excellent dans des domaines différents. Ubisoft impressionne par son open world riche, réaliste, détaillé et vivant, bénéficiant de graphismes somptueux, d’animations irréprochables et d’une météo immersive. Sucker Punch, pour sa part, mise sur la fluidité, des combats nerveux, une navigation sur la carte particulièrement lisible, tout en proposant une direction artistique marquante, capable de laisser une empreinte durable dans l’esprit du joueur. En résumé, Assassin’s Creed Shadows l’emporte sur la technique et le réalisme, tandis que Ghost of Yotei domine sur le plan du ressenti, de l’immersion et de la jouabilité. Chacun présente ses forces et ses faiblesses, et le choix dépendra surtout de ce que vous privilégiez : la richesse visuelle et la densité d’un monde ouvert, ou le plaisir immédiat et l’émotion d’un voyage au cœur du Japon féodal. De notre côté, on a un petit penchant pour Ghost of Yotei, plus fluide dans son exécution, plus fun dans son gameplay aussi.
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