Un beau jeu est-il forcément un bon jeu ? Evidemment que non, mais un jeu doté d'une plastique ravageuse, ça aide évidemment à gommer d'autres défauts. Dans le cas d'Avatar Frontiers of Pandora, il était primordial que les graphismes soient à la hauteur, et ce pour deux principales raison. La première, c'est que sortir après la beauté visuelle que fut Avatar 2 il y a un an au cinéma, c'était un véritable challenge pour Ubisoft et notamment le studio en charge du développement, à savoir Massive Entertainment, les créateurs de la série The Division. L'autre raison, c'est que le jeu est co-produit par 20th Century Studios et que James Cameron avait son droit de regard, à la fois sur le rendu visuel, mais aussi l'histoire du jeu. D'ailleurs, pour la petite histoire, sachez que le scénario de ce Frontiers of Pandora place ses événements entre les deux films. Vous ne verrez pas JakeSully ni Neytiri, mais plein de nouveaux Na'Vi, des peuples et des animaux jamais vus dans les films de James Cameron. Et vous allez voir que l'histoire de cet Avatar jeu vidéo est à la fois sa force, mais aussi l'une de ses faiblesses, mais on y revient dans quelques instants.
D'UNE BEAUTÉ INSOLENTE
On va déjà aborder la partie visuelle, les graphismes. Certains avaient des doutes, mais Ubisoft a réussi le pari de nous immerger virtuellement dans le monde de Pandora et très franchement ce n'était pas une mince affaire. Quand on sait à quel point les films de James Cameron sont visuellement incroyables, transposer cet univers entièrement en images de synthèse dans un jeu vidéo entièrement jouable et interactif, c'était casse-gueule, mais Ubisoft est parvenu à en faire quelque chose de captivant. C'est la principale force de cet Avatar Frontiers of Pandora qui est sans doute l'un des plus beaux jeux qu'on ait vu cette année, à côté d'Alan Wake 2. Je vous laisse apprécier les images, mais la représentation de Pandora est incroyable. C'est riche, c'est vivant, c'est immersif et très sincèrement, le jeu pousse le joueur à se perdre dans cet univers à la fois incroyable et captivant. Non, y a pas à tortiller de la nouille, graphiquement, ça tabasse, même si les PNJ donnent quand même le sentiment d'être en décalage complet avec le reste du jeu. Il faut dire que depuis que Rockstar Games est devenu le milestone à atteindre avec les PNJ de Red Dead Redemption 2, on est devenu super tatillon. Malheureusement, dans Avatar Frontiers of Pandora, les PNJ sont figés, ils ne bougent que rarement de leur zone de position et font les mêmes boucles d'animation de 30 sec. Pour un quadruple A, ça fait tâche, mais comme indiqué plus haut, le jeu arrive à se faire pardonner autrement.
Pourquoi ? Parce que Pandora est parfaitement restitué et on a affaire à un vrai jeu next gen. La végétation est fournie, riche, volumétrique aussi, ce qui veut dire que chaque plante, chaque feuille est un modèle 3D à part entière et pas juste un aplat de texture. L'autre élément qui donne le sentiment d'être en face d'un jeu next gen', c'est l'intégration du vent. On se rappelle à quoi point cette feature avait apporté à Horizon 2 il y a quelques années, là aussi le fait que le vent souffle chaque feuille ou élément du décor, ça participe à ce sentiment d'ultra réalisme. D'autant que la météo ajoute également son grain de sel, en apportant de la consistance et de la vie à la planète des Na'Vi. Les nuages assombrissent l'atmosphère, la pluie réduit la vision, la brume nous empêche de voir à plus de 5 mètres et les éclairs qui frappent le ciel quand l'orage gronde, ça nous a rappelé les bons moments de Red Dead Redemption 2. Tout cela est accompagné et appuyé par un sound design assez maboule, on va pas se mentir, et au casque, la sensation d'être immergé sur Pandora est vraiment dinguissime. Non, vraiment, le travail abattu par le studio Ubisoft Massive force le respect et une compatibilité réalité virtuelle ne serait pas de refus d'ailleurs.
SCOLAIRE, PEUT MIEUX FAIRE
Avatar Frontiers of Pandora est sublime, vous l'avez compris, mais qu'en est-il du gameplay ? Beaucoup de personnes s'amusent à comparer le jeu avec la licence Far Cry, car on sait à quel point Ubisoft recycle ses formules et ses assets. On va pas faire les étonnés, mais tout le monde le fait bien évidemment, FromSoftware aussi, on les a bien cramé avec Elden Ring, mais quand c'est fait intelligemment, ça ne pose aucun souci. Et bien sachez que les comparaisons entre ce Avatar et Far Cry n'ont pas lieu d'être. Le jeu arrive suffisamment à prendre ses distances en termes de gameplay pour éviter une telle comparaison. Le seul Far Cry qui lui ressemble le plus, c'est Far Cry Primal, l'un des épisodes les plus intéressants à mon sens, et que j'avais pris plaisir à parcourir. En fait, comme ce Avatar propose à la fois un gameplay au sol et aérien avec l'utilisation des Ikran, qui sont les fameux dragons volants, le jeu se détache donc de la formule Far Cry que beaucoup craignait. Cela dit, il subsiste quelques mécaniques similaires, comme les complexes de la RDA à saboter et qui ressemblent aux avants-postes de Far Cry, mais le fait d'alterner entre armes Na'vi et arsenal humain offre une belle diversité. Et attention, tirer avec des fusils d'assaut ne sont pas nécessairement plus efficace que décocher une flèche avec son arme ou sa lance, puisqu'il ne faut pas oublier que les Na'Vi sont naturellement plus grands, plus costauds et plus résistants que les humains. Leurs attaques sont donc souvent plus efficace que de tirer dans le tas, d'autant que notre personnage possède des aptitudes physiques qu'on pourra débloquer au fil de l'aventure.
INFILTRATION PAS AU POINT
Là où ça devient plus complexe pour Avatar Frontiers of Pandora, c'est que le jeu pousse le joueur à faire de l'infiltration, plus que du rentre-dedans. Sur le papier why not, mais il y a 2 problèmes majeurs. Le premier, c'est le level design, pas adapté pour un Na'Vi qui fait 3 mètres puisque ce sont des complexes humains qu'on doit infiltrer. Du coup, même accroupi, on est quand même assez visible. Et l'autre point fâcheux, et qu'on avait relevé dans notre preview, c'est que l'IA du jeu est assez défaillante. Tantôt les ennemis ne nous verront pas, et parfois, au moindre bruit, c'est l'alerte générale ? Comment est-ce possible ? Tout simplement parce qu'après les mauvais retours sur l'IA lors des previews, les développeurs ont ajusté leur jeu, mais comme ils ne pouvaient pas faire de miracles, ils ont opté pour la solution facile de développeurs, augmenter l'alerte et la férocité des ennemis. Résultat, dès qu'on se fait repérer, tout le monde nous tombe dessus, assez violemment, sachant que même en quittant la zone, les ennemis continuent de nous courser même 10 km plus loin. Ok, c'est très réaliste, mais c'est quand même abusé. Tout cela créé alors un déséquilibre dans la difficulté, d'autant que le jeu pousse le joueur à grinder et faire évoluer son personnage. Car oui, malheureusement, si vous suivez juste la trame principale, vous allez vous rendre rapidement compte que physiquement et au niveau des armes, vous serez trop juste pour abattre l'ennemi humain.
En essayant de se détacher de la formule Far Cry classique, Avatar Frontiers of Pandora sombre du coup dans une progression un peu trop scolaire, entre exploration, plateforme, balade à dos d'Ikran et postes humains à détruire. Bien sûr, le jeu nous propose moult activités à faire en dehors de la quête principale, mais rien qui pousse le joueur à s'y intéresser grandement. La chasse, la pêche, la cueillette, cuisiner, tout cela est possible sur le papier, mais comme rien ne nous y oblige véritablement et qu'il y a d'autres moyens pour se sustanter, on passe un peu à côté. Il y avait tellement de choses à faire, mais Ubisoft Massive s'est un peu perdu en route. D'ailleurs, nous aussi, on s'est beaucoup perdu en route, car malheureusement, dans cet univers si riche et fourni, il est difficile de trouver son chemin. Certes, on peut suivre ses sens Navi pour mieux se repérer, mais certains passages et éléments sont tellement mal indiqués qu'on peut passer 15 min à essayer de trouver un point d'intérêt alors qu'on se trouve bien dans la zone de recherche.
L'AIR DU VENT
De même, oui, on va faire plein de choses en suivant la quête principale, s'émerveiller en découvrant de nouveaux biomes, faire la connaissance de nouveaux peuples, mais il lui manque à chaque fois quelque chose d'épique à ce Avatar. Les combats sont présents, mais trop classiques, le bestiaire des ennemis pas suffisamment variés pour nous impliquer et il aurait fallu aussi intégrer des frictions entre Navi et pas que les Humains soient uniquement les antagonistes bêtes et méchants. Le jeu manque de boss, de méchants iconiques et de moment de gloire pour s'inscrire comme un grand jeu qui marque les esprits. On sent que toutes les ressources ont été mises dans le visuel, inattaquable, mais que Ubisoft Massive a oublié de raconter une histoire inoubliable, et dieu sait qu'il y avait à faire avec l'univers de James Cameron. Il y a cependant des moments magiques, de connexion véritable avec la nature de Pandora, et c'est aussi grâce à cette immersion folle qu'on a aimé le jeu, malgré ses défauts affichés.