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Superman : plus lumineux oui, mais plus foutraque aussi (Critique)

Superman : plus lumineux oui, mais plus foutraque aussi (Critique)
Après F1 et Jurassic World Renaissance – qui, soit dit en passant, domine actuellement le box-office – voici le troisième grand blockbuster de l’été : Superman. Attendu pour de multiples raisons, ce film incarne surtout le lancement officiel du nouveau DC Universe orchestré par James Gunn et Peter Safran, dans une volonté de rupture avec l’ère Snyder. Ce nouveau Superman devait donc poser les bases d’un univers remanié, aux tonalités plus colorées et optimistes, en écho aux premières heures du personnage dans les comics. La question se pose : James Gunn est-il parvenu à réenchanter Superman ? Peut-il rassembler des fans divisés depuis l’annonce du projet ? Rien n’est moins sûr, car le film divise profondément, et on est resté sur le bas-côté...



Si vous nous suivez assidûment, vous savez à quel point on attendait avec impatience ce nouveau Superman cuvée 2025. Pour être clair, je ne prends pas parti dans l’éternelle querelle entre les partisans de Zack Snyder/Henry Cavill et les défenseurs de la vision de James Gunn. Mon unique attente est celle d’un bon film de super-héros, tout simplement. D’ailleurs, j’apprécie en général le travail de Gunn – pas tout, certes, mais Les Gardiens de la Galaxie Vol. 3 m’avait profondément touché. Je reconnais également son intelligence lorsqu’il s’agit d’adapter l’univers des comics à l’écran. Malheureusement, sa vision de Superman n’a pas su me convaincre. J’aurais sincèrement aimé être séduit, j’étais prêt à accueillir cette relecture lumineuse de l’Homme d’Acier, mais le résultat est à mes yeux trop confus, trop chargé.  James Gunn, pourtant cinéaste éclairé en matière d’adaptations super-héroïques, a récemment tenu un propos fort pertinent : en 2025, il n’est plus nécessaire de raconter à nouveau les sempiternelles "origin stories" de certains héros. Plus besoin de revoir les perles du collier de Martha Wayne tomber au ralenti, ni l’araignée mordant Peter Parker, ni l’arrivée du petit Kal-El sur Terre. Sur ce point, je lui donne raison. Ces récits, archi-connus, méritent de laisser place à d’autres aspects des personnages. Ainsi, Gunn ouvre le film in media res, nous expliquant en quelques phrases que des extraterrestres vivent sur Terre depuis trois siècles, et que Superman y réside depuis trente ans. Le postulat rappelle d’ailleurs Jurassic World: Renaissance, dans lequel la cohabitation entre humains et dinosaures est devenue banale. De même ici, les méta-humains font désormais partie intégrante du quotidien.

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UN FILM COMIC

Toutefois, cette ambition de donner à voir un monde déjà peuplé de super-héros s’avère rapidement problématique. Le film souffre d’un trop-plein de personnages, introduits de manière précipitée, voire expédiée. En deux heures à peine, nous sommes confrontés à une profusion de figures – humaines et surhumaines – qui rend le récit indigeste. On sent que Gunn cherche à jeter les bases de son univers étendu, mais cela se fait au détriment de la clarté narrative. Il aurait sans doute été plus judicieux de réserver certains personnages à de futurs volets. Introduire Lex Luthor, Lois Lane, Guy Gardner, Mister Terrific, Hawkgirl, Metamorpho, l’Ingénieur, Rick Flag, Maxwell Lord, les parents adoptifs et biologiques de Superman, Krypto, Supergirl et l’intégralité du Daily Planet dans un seul film tient de la surcharge. Le résultat : une galerie de personnages à peine esquissés, dont certains sont réduits à de simples caméos, sans réelle fonction dramatique.

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Certes, les amateurs de l’univers DC apprécieront ces références. Mais pour le spectateur non initié, cet empilement devient rapidement un obstacle à l’immersion. Fallait-il introduire Metamorpho et son enfant dans ce Superman inaugural ? Non, d’autant que les effets visuels utilisés pour ces personnages sont discutables, rappelant les pires moments de The Flash. Le traitement de la Justice Gang, sorte de préfiguration d’une future Justice League, laisse également à désirer. Malgré un casting prometteur – Nathan Fillion en Guy Gardner, Isabela Merced en Hawkgirl – les personnages restent trop en retrait, apparaissant comme de simples utilités scénaristiques. Seul Mister Terrific bénéficie d’un développement à peu près cohérent, même si sa dimension martiale est négligée au profit d’un génie intellectuel certes intéressant, mais insuffisamment incarné. Lois Lane, incarnée par la remarquable Rachel Brosnahan, est quant à elle plutôt bien écrite dans la première moitié du film. Elle irradie par son charisme, sa détermination, son intelligence. Hélas, elle est reléguée au second plan dans la suite du récit, jusqu’à verser dans le cliché de la femme-accessoire. Un comble, surtout lorsqu’elle se retrouve, sans explication, aux commandes d’un vaisseau spatial. Un raccourci narratif peu crédible, même dans un film de super-héros.

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Autre déception : le Lex Luthor de Nicholas Hoult. Comédien talentueux, récemment convaincant dans Juré n°2 de Clint Eastwood, il hérite ici d’un personnage mal écrit. Introduit de manière prometteuse, il bascule rapidement dans une forme de cabotinage pénible. Il ne s’agit pas tant d’un défaut d’interprétation que d’un problème de direction d’acteurs et de construction du personnage. On comprend la volonté de Gunn de proposer un Luthor colérique et instable, mais cela vire à la caricature. Ce Lex Luthor manque cruellement de subtilité, à l’image du traitement outrancier qu’avait proposé Jesse Eisenberg dans le Snyderverse. Ironie du sort, la meilleure surprise du film vient de Krypto, le chien de Superman. Je n’étais pas convaincu par sa présence en version live-action, mais force est de constater que sa représentation, entièrement en CGI, est réussie. Inspiré du chien personnel de James Gunn, Krypto parvient à séduire sans tomber dans l’anthropomorphisme outrancier, et apporte une dose d’émotion bienvenue.

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Quant à David Corenswet, il faut lui reconnaître un mérite indéniable : il incarne un Superman convaincant, à la fois fidèle à l’iconographie classique du personnage (taille, regard, mâchoire, prestance) et capable d’y insuffler une dimension plus humaine. Il succède avec brio à Henry Cavill, tout en proposant une lecture plus chaleureuse, souriante, empathique de Kal-El. Un Superman qui se préoccupe des plus faibles, qui sauve autant des enfants que des écureuils, renouant ainsi avec l’esprit des comics d’antan. Mais cette humanisation du personnage ne plaira pas à tous. Certains regretteront de voir ce Superman vulnérable, souvent mis à terre, parfois ridiculisé. D’autres y verront une tentative intéressante de recentrer le super-héros sur l’homme, sur ses doutes et ses failles. Ce parti pris narratif rappelle les tonalités de Smallville ou Lois & Clark, avec un soupçon de Spider-Man version Sam Raimi. Toutefois, cette approche verse parfois dans le pastiche ou la série télévisée grand luxe, en particulier à cause d’une direction artistique très colorée, voire criarde, qui confère au film une allure de bande dessinée animée sans profondeur.

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Et si Superman avait pu porter un message politique intéressant, notamment à travers le conflit entre deux nations fictives (la Boravie ultra-militarisée et Jarhanpur, plus modeste), ce sous-texte est rapidement balayé par une intrigue cosmique mal amenée. L’introduction d’un "univers de poche" créé par Lex Luthor, permettant d’enfermer ses opposants dans une dimension parallèle, apparaît totalement hors de propos, tant sur le fond que sur la forme. La métaphore sur les fake news et les dérives numériques vire à la parabole maladroite, voire ridicule.  Malgré quelques belles séquences d’action aérienne et une énergie indéniable, le film souffre d’un montage précipité, d’un rythme frénétique, d’une narration surchargée. La volonté de transformer Superman en un comic-book en mouvement est visible, mais le manque de rigueur dans l’écriture rend l’ensemble confus. À force de vouloir trop en faire, James Gunn livre un film sans assise, manquant cruellement de gravité, au sens propre comme au figuré.

Les fans les plus passionnés de l’univers DC y trouveront peut-être leur compte, séduits par l’abondance de références et le fan service. Mais pour le grand public, ce Superman risque fort de ressembler à une course chaotique, bruyante, visuellement clinquante mais émotionnellement creuse. Ce que Gunn avait si bien réussi avec Les Gardiens de la Galaxie – cette alchimie entre action, humour et émotion – est ici absent. Le résultat, malheureusement, est un film déséquilibré, parfois bancal, souvent superficiel.

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Notre note : 5/10
Ce nouveau "Superman" avait pour mission de relancer un univers moribond, en offrant un visage plus humain, accessible et lumineux au plus iconique des super-héros. Si cette intention transparaît à travers l’interprétation sincère de David Corenswet et quelques moments de grâce, elle est malheureusement noyée dans un trop-plein de personnages, de sous-intrigues et d'effets artificiels. James Gunn, en voulant poser les fondations d’un univers entier dès ce premier chapitre, oublie l’essentiel : faire un bon film, autonome, cohérent et émotionnellement engageant. Ce "Superman" n’est ni un désastre, ni une réussite : c’est un objet hybride, déséquilibré, symptomatique d’un cinéma de franchise qui peine à concilier ambition narrative et exigences industrielles. Reste à espérer que ce faux départ permettra à la suite du DCU de mieux respirer, et surtout, de mieux raconter.


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