C’était la question qui est sur toutes les lèvres depuis un moment : Resident Evil Requiem optera-t-il pour la vue subjective de Resident Evil 7 et Village, ou pour la caméra à l’épaule des remakes de Resident Evil 2 et Resident Evil 4 ? La réponse est simple : les deux, mon capitaine ! Oui, Resident Evil 9 Requiem propose enfin ce que les fans réclamaient depuis des lustres : la possibilité de basculer à tout moment entre la première et la troisième personne. Directement depuis le menu 'Options', sans avoir à redémarrer le jeu, ni sacrifier sa sauvegarde, on peut donc changer de perspective. Une proposition qui change radicalement le ressenti du jeu, puisqu'en vue première personne, c’est l'immersion totale, avec une certaine perte des repères, une vision tunnelisée et ce ressenti de peur qu'on comprend avec la respiration forte de Grace Ashcroft, notre personnage principal. En troisième personne, le gameplay prend un tournant différent, plus action, mais jamais totalement rassurant.
TOUT EST DANS LA GRÂCE
Grace Ashcroft est donc un nouveau personnage inédit dans la saga Resident Evil, mais son ADN demeue familier : puisqu'elle est la fille d’Alyssa Ashcroft, personnage trop souvent oublié de Resident Evil Outbreak. Une filiation pas anodine, qui résonne d’autant plus fort lorsque l’on découvre que sa mission la mène à l’hôtel Remwood, lieu de la mort de sa mère huit ans plus tôt. Et c’est ici que commence la démo à laquelle nous avons pu assister dans le noir complet. Un cauchemar pour Grace qui se réveille suspendue par les pieds, une perfusion dans son bras, dans une pièce transformée en temple de la douleur. Une mise en bouche efficace, qui place immédiatement le joueur dans un état de vulnérabilité totale. Son rôle dans l’intrigue reste encore flou, mais tout laisse penser qu'elle est victime d’un rituel ou d’une expérimentation, enfermée dans un bâtiment aux allures d’hospice décrépit.
Ce qui suit est un condensé de ce que Capcom sait faire de mieux depuis Resident Evil 7 : de l’exploration anxiogène, un sound design percutant, et une direction artistique gothique dans l’âme, baroque dans les détails. L’hôtel Remwood, ou plutôt le service médical ancré en son sein, rappelle les grandes heures du manoir Spencer : hallways étroits, pièces closes, portes grinçantes, et obscurité oppressante. Un vrai retour aux sources. La lumière y est rare, tremblotante, parfois même traîtresse. Un couloir peut s’éclairer pour ne révéler qu’un abîme d’ombres mouvantes. Le joueur n’a pour se repérer qu’un simple briquet Zippo, renforçant cette impression d’avancer à tâtons dans un piège vivant. D’ailleurs, même les munitions se font rares. Au début de l’aventure, Grace n’a que des bouteilles à lancer pour se défendre, autant dire rien, et ses actions vont de la simple ouverture de porte à la récupération d'objets nécessaires, en résolvant des puzzles classiques de la série : portes verrouillées, gestion d’inventaire, objets clés. Une interface on ne peut plus familière.
MONSTER HUNTER
Et puis vient le monstre. Un être difforme, immense, à la peau flasque, dont la silhouette hideuse évoque les pires cauchemars de Silent Hill. Trop large pour passer les portes, il se contorsionne de manière non naturelle, prêt à broyer la pauvre Grace à mains nues. La séquence, largement scriptée, n’en reste pas moins angoissante. On pense forcément à la maison Beneviento dans Resident Evil Village, mais ici, le malaise est porté à un niveau supérieur. Et quand on la fuit, le gameplay prend tout son sens : en première personne, c’est la panique viscérale ; en troisième, on gagne en lisibilité mais on sent le poids de la peur dans chaque chute, chaque porte bloquée, chaque détour forcé. Mention spéciale à une scène glaçante : Grace retrouve un cadavre, avant que la créature n’émerge littéralement du mur pour l’engloutir, le tout avec une proximité étonnante. Un jumpscare maîtrisé, d’autant plus fort qu’il surgit après une accalmie trompeuse.
Le RE Engine, ici dans une forme encore affinée, est toujours de la partie. Capcom ne précise pas s’il s’agit d’une nouvelle version du moteur, mais le rendu est d’une propreté clinique : textures précises, ombres dynamiques, gestion de la lumière absolument démoniaque. Dans une pièce, le simple fait d’allumer une lampe suffit à créer plus de tension qu’une horde de zombies. Car la lumière n’illumine jamais assez, et l’ombre s’y cache toujours. Mais plus que la technique, c’est le ton du jeu qui impressionne. Resident Evil Requiem semble vouloir renouer avec l’horreur psychologique pure, celle de Silent Hill 2, de Amnesia, ou du premier Fatal Frame. Une horreur subtile, intime, dérangeante. Selon Koshi Nakanishi, le réalisateur (déjà aux manettes de Resident Evil 7), Resident Evil 9 Requiem cherche à combiner la pureté du survival horror avec un sentiment de frisson contrôlé. Une peur non plus imposée, mais presque désirée. Et la bascule entre la vue subjective et la troisième personne en est la parfaite incarnation. Dans les moments calmes, la vue FPS amplifie l’angoisse de l’inconnu. Lors des confrontations, la vue TPS permet un contrôle plus stratégique, sans jamais tomber dans le gunfight bourrin. Et Capcom semble bien décidé à pousser cette dualité jusqu’au bout. Une première dans la série.
BACK IN BUSINESS
Des rumeurs persistantes évoquent la présence d’un second protagoniste, peut-être Leon S. Kennedy, qui permettrait de varier les ambiances avec des phases plus orientées action. Mais les passages avec Grace seront clairement ceux de l’horreur pure, et Capcom semble jouer cette carte jusqu’au bout. Resident Evil 9 Requiem ne va pas réinventer la roue, mais il apporte son savoir-faire en la matière. Avec un casting inédit, une ambiance aux petits oignons, une technique affûtée, et une promesse de terreur renouvelée, ce RE 9 Requiem pourrait bien être le chaînon manquant entre l’épouvante viscérale de RE 7 et le gameplay ciselé de RE 2 Remake. Il faudra patienter jusqu’à la Gamescom 2025 pour y rejouer. Mais une chose est déjà sûre : la peur, la vraie, celle qui vous colle à la peau, fait son grand retour.