Malgré notre curiosité évidente, il semblait difficile de ne pas cacher aussi notre légère inquiétude autour de Control. Non pas que nous doutions du savoir-faire de Remedy, qui n’est clairement plus à prouver, mais disons que les séquences dévoilées rappelaient un peu trop son prédécesseur, Quantum Break, au point de perdre un peu en personnalité. De plus, sa direction artistique épurée et cubique laissait paraître, en quelque sorte, un certain manque d’ambition visuelle que nous ne souhaitions évidemment pas. Le prendre en main, même au travers d’une courte démo, était donc enfin l’occasion de nous rassurer tant sur son gameplay que sur son monde étrangement torturé. Autant vendre la mèche d’emblée : s’il a encore à prouver, Control a peu de chance de faire un faux départ.
THE WEIRDEST HOUSE
Control dispose d’un univers franchement particulier qu’il semble primordial de resituer. Celui-ci met en place Jessie Fayden, travaillant au sein du Bureau Fédéral du Contrôle, une agence gouvernementale mystérieuse dont le QG, The Oldest House, sert de théâtre aux événements du jeu. Seulement voilà, le numéro un de l’organisation est assassiné et Fayden, un poil dépassée par les événements, se retrouve promue dirigeante de tout le département. De plus, le bâtiment est pris d’assaut et il lui advient alors de le délivrer entièrement : pour ce faire, notre héroïne dispose de capacités surnaturelles dont les origines demeurent encore inconnues, et d’une arme à feu unique mais polymorphe, aux capacités diverses. Control mise donc énormément sur son gameplay très aérien qui se prend, d’emblée, plutôt bien en mains. Jessie n’est pas vraiment du genre à se laisser faire et n’a rien à envier à certains super-héros : avec L1/LB, elle peut arracher de multiples éléments du décor pour s’en faire un bouclier avant projection tandis qu’avec R1/RB, elle peut lancer l’objet de son choix avec une puissance dévastatrice. Sa télékinésie prononcée lui permet également de léviter, se maintenant dans les airs et se projetant sur les directions de son choix, ou d’asséner ses ennemis d’une onde de choc ahurissante au corps à corps. Force est de constater que l’ensemble des techniques parvient de façon assez naturelle et débouche, alors, sur des combats extrêmement dynamiques, certains ennemis disposant également de capacités similaires. Certains feront un parallèle évident à la force de Star Wars, et ce n’est pas totalement faux : on prend un malin plaisir à envoyer bureau, canapé et autre frigidaire dans les dents d’un détracteur avant de lui mitrailler le visage à cinq mètres de hauteur.
Jessie Fayden est une femme de caractère, et les multiples formes – jusqu’à cinq au total, nous annonce-t-on – de son pistolet permettent de varier un peu les techniques. Rajoutez à cela les diverses optimisations qu’il est possible d’attribuer à son arme, comme pour améliorer la puissance, la cadence de tir ou le rechargement, ainsi qu’à l’héroïne elle-même, et vous obtenez des affrontements plutôt complets. De plus, certains petits détails viennent approfondir le jeu, comme des éléments à détruire en priorité afin d’affaiblir les ennemis, ou ce pouvoir permettant d’en faire basculer de votre côté. On notera également des spécificités originales, comme la possibilité de regagner de la vie en attaquant (c’est d’ailleurs le seul moyen de rétablir sa santé). En soi, Control n’invente pas grand-chose mais ses structures s’avèrent suffisamment efficaces, du moins dans un premier temps, pour procurer du plaisir in-game. À voir si ses ficelles parviendront à se renouveler suffisamment sur la durée : là, en revanche, ce n’est pas forcément garanti.
CHELOU-LAND
L’autre argument de taille, et certainement celui qui nous attire le plus, c’est incontestablement l’univers créé de toutes pièces par Remedy. Le studio est largement renommé pour cette qualité spécifique : Max Payne, Alan Wake et Quantum Break sont des perles évidentes et, visiblement, Control ne devrait déroger à la règle. Contrairement à ce que l’on pouvait penser, The Oldest House n’est pas qu’un vaste bunker aux murs lisses qui se ressemblent tous mais semble regorger de secrets en tout genre : tout d’abord, il faut savoir que le jeu s’inscrit sous des airs de monde semi-ouvert, avec de multiples zones interconnectées entre elles que l’on se doit d’explorer afin d’en découvrir tous les détails. Ceux-ci peuvent être aussi anecdotiques – un coffre ou un item à récupérer – qu’essentiels pour l’histoire. Indéniablement, Control dispose de bien des aspects d’un Metroidvania, laissant le joueur libre face une exploration qu’il jugera nécessaire ou non. Il est alors possible de dénicher des laboratoires scientifiques, des notes, des films en live-action, approfondissant le background et suscitant terriblement l’intérêt.
Dans Control, il n’y a pas de magie mais uniquement des expérimentations scientifiques qui ont plus ou moins mal tourné : certaines zones du bâtiment surprennent véritablement avec des sous-sols envahis par la végétation, des labyrinthes psychédéliques aux couleurs chaudes ou des tréfonds sombres et torturés. L’annonce des changements de zone, lui-aussi, est impressionnant et renforce cette volonté atmosphérique vraiment réussie. La direction artistique léchée s’appuie ainsi sur des effets de particules saillants, mais que l’on doit noter malheureusement un peu trop ambitieux, même pour une PS4 Pro qui voit alors son framerate chuter assez souvent. Tenez-le vous pour dit. Néanmoins, l’ambiance fait mouche et Control pourrait bien en faire sa principale force, si tant est que le scénario suive : pour le moment, il est très difficile de savoir où nous emmènera l’histoire puisque nous n’avons eu, par exemple, aucune cinématique. Mais The Oldest House promet des passages mystérieux et savoureux, c’est assurément un grand pouce en l’air de notre côté.