Dans le jeu vidéo, la coopération est un exercice tellement casse-gueule que les studios y réfléchissent à deux fois avant de s’y aventurer. Pour tout vous dire, on redoutait que Sumo Digital se contente d’un jeu de course banal, c’est-à-dire additionner les points glanés par chaque pilote pour déterminer l’équipe gagnante. Une formule mathématique basique que l’on s’amusait déjà à coucher sur papier à l’époque de Mario Kart 64. Non, les développeurs sont réellement allés au bout de leur démarche en proposant des mécaniques de gameplay qui incitent à la jouer collectif, à faire passer les intérêts de nos potes avant les nôtres. Par exemple, les coéquipiers ont la possibilité de se filer des objets, sachant que la qualité de ces derniers sera boostée pendant la transmission. Ainsi, si l’on balance un turbo simple à l’un de nos partenaires, il se retrouvera avec un triple boost. Dans le même esprit, il y a moyen de prendre l’aspiration de notre camarade pour gratter une accélération, une manœuvre qui ne fonctionne pas avec le pilote d’une équipe rivale, bien évidemment. On peut aussi évoquer le Turboraz qui consiste à passer tout près d’un allié quand il est au ralenti ou lorsqu’il s’est fait éjecter du circuit ; il pourra alors bénéficier d’un turbo plus ou moins puissant en fonction de l’écart de vitesse entre les deux karts. Soucieux d’offrir le maximum de clarté sur la piste, Sumo Digital a eu l’idée de faire apparaître en surbrillance nos concurrents directs au classement. Du coup, leur faire mal sert non seulement à améliorer la position de notre team, mais aussi et surtout à remplir la jauge de Superturbo. Une fois activé, celui-ci permet de profiter pendant quelques secondes d’une accélération continue durant laquelle on est invulnérable.
Non, les développeurs sont réellement allés au bout de leur démarche en proposant des mécaniques de gameplay qui incitent à la jouer collectif, à faire passer les intérêts de nos potes avant les nôtres.
Toujours dans cette optique d’encourager les pilotes à coordonner parfaitement leurs actions, toutes les opérations menées pour le bien de l’équipe gonflent immédiatement la jauge de Superturbo. Et vu l’avantage qu’il procure (notamment quand les trois compères l’enclenchent en même temps, ce qui augmente sa durée), on peut vous garantir qu’on évite le plus possible de la jouer solo. Team Sonic Racing sue la coopération par tous les pores, et on le ressent clairement en jetant un œil au casting du jeu. Au lieu d’aligner bêtement les pilotes, les développeurs les ont répartis en trois types de classes : Technique, Puissance et Vitesse. Les persos techniques (Tails, Chao, Silver, Rouge, Dr. Eggman) sont les seuls capables de rouler sur n’importe quel revêtement sans subir le moindre ralentissement, tandis que les protagonistes puissants (Knuckles, Big, Vector, Omega, Zavon) peuvent pulvériser un obstacle sans sourciller ; pratique pour découvrir des raccourcis quand on a l’œil. Les pilotes rapides (Sonic, Amy, Blaze, Shadow, Metal Sonic), pour leur part, neutralisent tout missile qui les approche d’un peu trop près, à condition de déraper proprement. Bien que les catégories aient tendance à se compléter, rien n’empêche de tout miser sur une seule. Privilégier exclusivement des persos rapides implique de squatter les premières places et de ne pas se mêler à la bataille, leur capacité à encaisser les attaques adverses étant faible. Une équipe composée de Tails, Silver et Rouge revient à connaître toutes les portions du circuit où l’on peut gruger en coupant les virages. Quant à un trio basé uniquement sur la puissance, ça garantit une bonne robustesse, certes, mais au détriment de la vitesse et de la maniabilité.
LA DREAM TEAM
Perso, on préfère varier les plaisirs avec différents profils : selon le déroulement de la course, on dispose alors d’une plus grande souplesse pour adapter la stratégie de l’équipe et gratter des points précieux dans les ultimes instants. Essentiel dans Team Sonic Racing, le système de communication a été particulièrement soigné via des indicateurs qui permettent de savoir en permanence où l’on en est par rapport au reste de la team. Une fenêtre qui s’affiche quand un pote souhaite nous refiler un Wisp, des dialogues qui s’activent lorsqu’un partenaire prend notre aspiration, ou encore une jauge qui apparaît pour mieux synchroniser le Superturbo ; voilà un exemple des outils présents dans l’interface qui fait largement le job. Bien sûr, les mécanos en herbe peuvent aller faire un tour dans le garage pour trifouiller les véhicules. C’est d’ailleurs la principale utilité des crédits remis au terme de chaque course, à savoir acheter des pièces détachées pour modifier le comportement du bolide. Si la classe du pilote ne change pas donc, il est en revanche possible de toucher à la maniabilité, au turbo, ou encore à la défense pour être plus à l’aise derrière le volant. Ce n’est pas tout, car les capsules renferment également des boîtes bonus. En gros, il s’agit de perks octroyant divers avantages sur la piste – le turbo qui se charge plus vite pendant un dérapage, se présenter sur la grille de départ avec un Wisp directement en poche, augmenter les chances de tomber sur tel ou tel item, bénéficier d’un départ turbo automatique, etc. Mises bout à bout, ces finesses font que l’on se retrouve avec un gameplay huilé ; voilà qui devrait rassurer ceux qui craignaient un énième ersatz insipide. Après, on regrette que le jeu ne soit pas aussi exigeant que son illustre modèle : si l’on s’entoure de deux acolytes rompus aux Mario Kart-Like, l’affaire peut être pliée facilement, y compris avec une I.A. réglée sur Expert.
Essentiel dans Team Sonic Racing, le système de communication a été particulièrement soigné via des indicateurs qui permettent de savoir en permanence où l’on en est par rapport au reste de la team.
C’est là que l’on touche du doigt le défaut majeur de Team Sonic Racing, c’est-à-dire sa grande mansuétude à l’égard des moins doués. Il suffit de scruter chaque circuit pour comprendre qu’au-delà de leur largeur qui autorise quelques approximations, il n’y a pas vraiment de zone tendue susceptible d’écrémer les pilotes. Même les secteurs dépourvus de rails de sécurité ne font pas peur, tout le contraire de Mario Kart qui, on le rappelle, impose aux joueurs d’utiliser les objets avec justesse sous peine de se les prendre en pleine figure. Dans Team Sonic Racing, et sauf erreur de notre part, si l’on s’amuse à balancer une bombe au pif et que l’on est pris dans la déflagration, on ne subira aucun dégât ; idem pour les partenaires. C’est dommage, car ça aurait favorisé les retournements de situation et nécessité un peu plus de skill de la part des pilotes. A confirmer, car il n'est pas impossible que la hitbox nous ait joué des tours. Quoi qu'il en soit, les développeurs ont intégré une vingtaine de Wisps pour animer les débats. Sans surprise, on retrouve l’équivalent de la carapace verte (tir alterné), de la carapace rouge (l’aigle pourpre), de l’étoile (invincibilité), du fantôme (fantôme de Jade), du Bill Balle (vrille jaune), ou encore du Bloups (rythme magenta). Teamwork oblige, certains Wisps n’apparaissent que lorsque les pilotes se refourguent les boîtes à objet, sachant que là encore, le contenu dépend de la classe du personnage. Dans tout ça, on a eu un coup de cœur pour l’éclat rouge qui les brise sévère dans les portions sinueuses, et pour le vide mauve dont le trou noir aspire tout sans pitié. Ah oui, il y a aussi le séisme gris dont les piliers de pierre sont particulièrement difficiles à esquiver mais pas indestructibles.
HÉRISSON TOUT HÉRISSÉ
Côté contenu, si vous avez sans doute déjà capté que le jeu permettait d’incarner 15 personnages, précisons que 21 circuits sont disponibles (42 si l’on compte le mode « Miroir »), sans oublier la campagne principale qui n’arrive pas à l’orteil de celle de Diddy Kong Racing. Anecdotique sur le plan scénaristique, répétitive au possible, elle se résume en réalité à une succession de courses avec des objectifs différents. On ne va pas revenir sur chaque type d’épreuve, mais il y a en a pour tous les goûts : ramasser le maximum d’anneaux, être le dernier pilote à rester en piste, détruire le plus d’Egg Pawns possible, slalomer en rasant les bornes étoile, passer entre les voitures, gagner une série de quatre courses avec son équipe, etc. Tout n’est pas accessible dès le départ, et il est donc indispensable de récupérer des étoiles pour progresser dans les sept chapitres. S’il y a 142 étoiles en tout et pour tout, une soixantaine environ suffisent à boucler le mode « Histoire » en solo ou à trois. Justement, pour ce qui est du multi, l’écran splitté est de rigueur, que ce soit pour un Grand Prix ou une course simple ; seul le contre la montre est exclusivement solo. Bien que les menus auraient gagné à être plus ergonomiques, on apprécie quand même la possibilité d’ajouter/retirer des participants d’une simple pression sur Options (PS4). Bien vu, aussi, le fait de pouvoir piloter chacun pour soi et non en équipe ; idéal pour démontrer que l’on n’est pas le boulet de la team.
On ne peut pas en dire autant des circuits qui manquent d’inspiration (un peu) et de technique (beaucoup) pour donner des frissons aux puristes du genre.
En ce qui concerne le jeu en ligne, nous n’avons pas eu l’opportunité de tester la solidité des serveurs, mais si l’on en croit Sumo Digital, en dehors des Grand Prix et des courses classiques, il n’y a rien d’autre à voir. Pourtant, il aurait été judicieux de glisser quelques épreuves du mode « Histoire » – un constat valable pour les parties à plusieurs en local, d’ailleurs. Enfin, en matière de réalisation, Team Sonic Racing s’avère propre même si l’on observe quelques inégalités au niveau des circuits. On a tout de suite accroché à Hidden Volcano, Whale Lagoon et Turbine Loop, un peu moins à Haunted Castle, Sand Road et Ocean View. Ils ne sont pas bidons, entendons-nous bien, mais ils ne marquent pas les esprits. En fait, le plus embêtant demeure le framerate qui morfle dès que l’écran est splitté (le test a été réalisé sur une PS4 standard). On s’en doutait, et on imagine les dégâts sur Nintendo Switch où le jeu tourne à 30fps (contre 60fps sur les autres supports). Quoi qu’il en soit, la modélisation des véhicules et des persos est impeccable, et le design plus « agressif » tranche avec la dégaine rondouillarde que l’on a l’habitude de voir chez le voisin moustachu. Du Sonic pur jus, quoi.