Ne tournons pas autour du pot plus longtemps : F1 2010 est une merveille. Visuelle tout d'abord, avec une réalisation du tonnerre parfaitement orchestrée par l'EGO Engine, toujours lui. Le moteur home made de Codemasters démontre une nouvelle fois qu'il n'a, à l'heure actuelle, vraisemblablement pas d'équivalent quand il s'agit de faire tourner des voitures à plein régime. La modélisation des monoplaces - calqué sur le design des modèles de la saison 2010 - est criante de réalisme, et le relief des circuits respecte au centimètre près celui des versions originales. Fabuleux. Mais le plus fort reste quand même les conditions météo qui peuvent varier pendant la course, et faire basculer le déroulement de celle-ci. Les gouttelettes d'eau qui viennent se coller à l'écran lorsque l'on est en vue subjective ou en mode cockpit ont beaucoup de charme, et puis voir les flaques se former progressivement sur la piste est tout simplement une tuerie pour les yeux. Sincèrement, piloter sous la pluie, aussi périlleux que cela puisse être, ça n'a pas de prix dans F1 2010. L'eau qui dégouline sur le casque, les gerbes projetées par les autres concurrents qui détruisent la vue, sont autant de délices artistiques que l'on apprécie particulièrement lorsque l'on passe un dimanche après-midi sur deux devant la télévision. Par temps sec, il est possible d'observer quelques traces laissées par des freinages un peu trop appuyés, et faire du hors-piste sera l'occasion de voir des gravillons ou du gazon venir se coller aux pneus. Globalement, la sensation de vitesse est excellente dans F1 2010, même si l'on relève quelques légères baisses de régime ici et là ; mais rien de bien méchant. Et bien que Codemasters ait pris le temps de soigner toutes les petites animations qui font la différence et rendent le jeu encore plus authentique - le pilote qui bouge sa tête dans les virages, l'activation de certaines commandes sur le volant par exemple -, on regrette que la même attention n'ait pas été apporté au niveau des mécanos qui demeurent mono-expressifs du début à la fin. Enfin, l'absence de podium à la fin des courses est assez étrange avec le souci du détail dont a toujours su faire preuve Codemasters ; une disquette qui a encore du mal à passer.
Stop and go
Bien avant de s'en prendre plein les mirettes, F1 2010 met déjà la pression en termes d'immersion. Au lieu de balancer les formalités administratives - prémices du mode "Carrière" - comme si on était à la mairie de Saint-Denis, les développeurs de Codemasters ont préféré scénariser cette étape, avec une première interview menée par Sophie Dubreuil que l'on retrouvera tout au long de la carrière de notre pilote. On aurait quand même préféré avoir affaire à Anne Guintini pour décliner son identité, définir son niveau de pilotage et, surtout, faire part de ses ambitions dans le royaume de la Formule 1. Ces deux derniers éléments sont indispensables pour déterminer non seulement le degré de difficulté des courses - que l'on pourra modifier ultérieurement -, mais également le nombre de saisons nécessaires pour devenir une légende de la discipline, à savoir trois, cinq ou sept. Naturellement, on n'aura pas forcément besoin de sept saisons pour faire ses preuves et décrocher le titre de champion du monde, puisque les développeurs de Codemasters sont parfaitement conscients que les prodiges ça existe. Mais en choisissant de s'étaler sur sept saisons au lieu de trois, le chemin pour intégrer un top team (Ferrari, Red Bull, McLaren) sera évidemment plus long. Ce qui est particulièrement motivant, car il va falloir enchaîner les prestations de grande classe sur la piste - et accumuler surtout les précieux points de réputation - pour se faire remarquer, et inciter ainsi les écuries concurrentes à faire des propositions de contrat à notre agent. Celui-ci ne manquera pas d'ailleurs de faire régulièrement un tour d'horizon des offres reçues, avec également quelques commentaires sur les propos de son poulain tenus face à la presse. Car mine de rien, les interviews ont une grande influence sur le comportement des autres teams, qui approcheront plus ou moins directement le pilote en fonction de ses réponses. En effet, se montrer hermétique aux autres constructeurs ne leur donnera pas envie de tenter une première approche, alors qu'avoir les dents longues ne sera certainement pas le meilleur moyen de motiver ses troupes.
Naturellement, on n'aura pas forcément besoin de sept saisons pour faire ses preuves et décrocher le titre de champion du monde, puisque les développeurs de Codemasters sont parfaitement conscients que les prodiges ça existe."
En fait, tout est question de diplomatie et de doigté. Rien n'interdit de faire comprendre à ses patrons - résultats à l'appui - que l'on mérite la place de n°1 au sein de l'équipe, histoire d'avoir la primeur des améliorations apportées à la monoplace durant la saison. Un égo qu'il faudra mettre de coté si l'on souhaite intégrer à l'avenir une écurie du haut de tableau, puisque certaines n'hésiteront pas à proposer un contrat avec le statut de n°2 surligné en rouge ; une incohérence qui a le don de vexer quand on est champion du monde en titre, et qui fait écho aux autres approximations de F1 2010. On comprend difficilement en effet qu'il faille attendre systématiquement que ce soit les écuries qui se manifestent pour négocier un éventuel transfert, alors que l'on aurait aussi aimé pouvoir les solliciter directement. Car lorsque l'on se fait draguer par Lotus ou bien Virgin en mettant une seconde au tour à Fernando Alonso, on n'y comprend plus rien. Pour faire monter les enchères, il est toujours possible de jouer au poker-menteur et de refuser certaines offres dans l'espoir de les voir réhaussées par la suite. Cela dit, quand Ferrari arrive avec ses conditions, on la boucle et on les accepte ; au point que l'option "Refuser" soit grisée. En ce qui concerne les interviews, elles se montrent rapidement répétitives avec des choix de réponse limités. Impossible de se faire piéger par une interrogation vicieuse, et on saisit rapidement la façon dont il faut s'y prendre pour faire plaisir à ses supérieurs. F1 2010 manque cruellement de subtilité à ce niveau-là, et c'est bien dommage quand on sait que Christophe Malbranque a prêté sa voix au jeu, pour les sessions de questions-réponses à l'issue des essais libres et qualificatifs.
Le Baron Rouge
L'intérêt de F1 2010 frise le zéro absolu lorsque toutes les aides au pilotage sont activées. Il suffit juste de tourner correctement le volant et de garder le pied sur l'accélérateur pour être aussi impérial que le Michael Schumacher d'il y a quatre ans. Cela dit, même les novices doivent redouter les vibreurs capables de faire partir la monoplace en vrille, surtout sur sol mouillé. Méfiance donc, mais c'est bien entendu en full simu que le jeu de course de Codemasters est le plus jouissif. Avant d'entrer dans le vif du sujet, il convient de préciser que plusieurs degrés de réalisme peuvent également être appliqués au règlement. On peut choisir entre un week-end court ou long, sachant que dans le premier cas ne figurent qu'une seule séance d'essais libres, et que les qualifications ne se déroulent que sur une quinzaine de minutes. En revanche, en format long, on a droit à deux séances d'essais libres pour peaufiner les réglages, et les qualifications sont fractionneés en plusieurs sessions - Q1, Q2 et Q3 pour les connaisseurs. Quant au nombre de tours à accomplir, ça dépend de la vie sociale de chacun, mais il est quand même intéressant de savoir que l'on peut en enquiller autant que les pilotes professionnels si on le souhaite. Ce n'est pas une nouveauté, mais ça impressionne toujours la belle-famille. Enfin, on n'oubliera pas de signaler que F1 2010 permet d'activer des flashbacks à l'instar de Race Driver : GRID, et qu'ils offrent l'occasion de se rattraper en cas de courbe mal négociée. Bien évidemment, le nombre de flashbacks disponibles décroît au fur et à mesure que le niveau de difficulté augmente - de quatre à zéro pour être plus précis. Mais honnêtement, c'est rare d'y avoir recours, et ce pour deux raisons. La première, c'est qu'il s'agit de Formule 1 et que, sciemment ou non, on prend moins de risques que lorsqu'il s'agit d'un autre sport automobile. L'autre raison, c'est que l'on joue le jeu - les vrais en tout cas -, et que l'on préfère se taper un zéro pointé au championnat que de "tricher".
Quant au nombre de tours à accomplir, ça dépend de la vie sociale de chacun, mais il est quand même intéressant de savoir que l'on peut en enquiller autant que les pilotes professionnels si on le souhaite."
Ce qui frappe lorsque l'on joue à F1 2010 sans la moindre béquille, c'est la prise en main qui nécessite quand même un certain temps d'adaptation. On a même l'impression que la monoplace est inconduisible tellement il faut faire preuve de finesse dans les accélérations et les freinages. Une excellente connaissance des tracés est vitale ne serait-ce que pour anticiper correctement les virages et réaliser un bon chrono. C'est vitale aussi dans la mesure où la moindre erreur d'appréciation se paie cash, où presque si l'on a la chance de perdre le contrôle de la machine dans une zone dégagée. Autant dire qu'à Monaco ou à Valence, c'est l'abandon assuré. Pourtant, il est évident que F1 2010 offre un parfait équilibre entre arcade et simulation, mais les développeurs de Codemasters ont poussé le réalisme au point de solliciter constamment la concentration du pilote. Lorsque la pluie pointe le bout de son nez, il est inutile et suicidaire de repousser le passage au stand pour gratter quelques secondes supplémentaires, car là encore la marge de manoeuvre est archi réduite. Sous une pluie diluvienne, ce n'est même pas la peine de jouer au héros en appuyant un peu plus sur l'accélérateur que les concurrents. C'est plutôt la prise de trajectoire qui prime, et dépasser devient une épreuve périlleuse, sachant que le manque d'adhérence guette à chaque virage. En parlant de dépassement justement, on apprécie le fait que les circuits réputés pour ne pas les favoriser restent fidèles à eux-mêmes dans F1 2010. Ca rajoute du piment aux courses, et puis ça rend les sessions qualificatives encore plus déterminantes. Les amateurs de Formule 1 le savent : la victoire passe aussi par un bon réglage du véhicule. Il est possible de bidouiller avec à peu près tout ce que l'on veut, même si on notera quand même l'absence flagrante de télémétrie. En course, l'aileron avant et arrière peuvent être plus ou moins inclinés, et le règlement impose l'utilisation des pneus option et prime dans la même course. Même si notre ingénieur de course pense à nous le rappeler, un oubli dans le feu de l'action est vite arrivé. Et puisqu'il faut bien parler de l'I.A., on constate qu'elle se montre assez idiote en ce qui concerne les mécanos. Quand ces derniers laissent passer poliment les concurrents dans les stands et font perdre plusieurs places au classement, il y a de quoi pester. Sur la piste, les concurrents respectent les règles de sécurité et ne cherchent jamais à forcer le passage. Un bon point, même si c'est aussi au joueur de fermer l'angle quand il le faut pour ne pas se faire doubler. Il y a quand même des limites à la politesse.