La Bible. Une source d'inspiration intarissable dont le jeu vidéo n'est pourtant pas coutumier, alors qu'il est pourtant plus facile de faire rêver les geeks avec des êtres venus d'ailleurs. Ceux d'El Shaddai : Ascension of the Metatron sont des anges déchus qu'Enoch, le héros, va devoir affronter sur Terre pour éviter qu'ils sèment le chaos. Et il ne faut qu'une poignée de minutes pour se rendre compte que les développeurs d'Ignition Entertainment ont pris quelques libertés avec le Livre d'Hénoch. Comprenez par là qu'il ne sera pas nécessaire d'emprunter le bouquin à l'église du coin, afin de ne pas être pris pour un crétin par Lucifer qu'Enoch va devoir, d'ailleurs, se coltiner durant tout son périple. Veste cintrée et ouverte jusqu'au nombril, torse imberbe, regard made in Têtu, il ne nous semble pas avoir aperçu ce Lucifer là à la messe dimanche dernier. Mais bien plus que ses penchants sexuels que Maxime s'amusera sans doute à deviner, ce sont surtout ses coups de fil réguliers à Dieu qui font sourire. L'histoire ne dit pas s'il tient le Galaxy S2 ou l'iPhone 5 d'Apple entre ses mains, mais il s'agit en tout cas d'un passage obligatoire pour les sauvegardes. Ses claquements de doigts à chacune de ses irruptions ajoutent au charme d'El Shaddai, qui démontre qu'il existe toujours des studios japonais prêts à imposer les produits du pays en Occident, sans trahir leurs origines. Car El Shaddai : Ascension of the Metatron est tout sauf un titre conventionnel. C'est tout simplement un OVNI qui donne l'impression que l'on vient de sortir d'un coffee shop d'Amsterdam, et que notre sac de voyage nous fait la conversation dans notre chambre. Bref, un jeu typiquement nippon à ne pas mettre entre n'importe quelles mains.
Ses claquements de doigts à chacune de ses irruptions ajoutent au charme d'El Shaddai, qui démontre qu'il existe toujours des studios japonais prêts à imposer les produits du pays en Occident, sans trahir leurs origines."
Dommage, car la réalisation d'El Shaddai vaut vraiment le détour. En fait, le jeu d'Ignition Entertainment monte en puissance au fil des chapitres, et ce n'est qu'une fois en Enfer que l'on succombe totalement au spectacle visuel qu'il représente. Ce n'est pas la modélisation simpliste des personnages qui met par terre, mais plutôt les environnements splendides que traversent Enoch et Lucifer au cours de l'aventure. A la fois épurés et gorgés de détails, les niveaux affichent des effets de toutes sortes qui font d'El Shaddai : Ascension of the Metatron une véritable oeuvre d'art, et rappellent si besoin était que Sawaki Takeyasu a quand même bossé sur Okami. C'est encore plus vrai lorsque l'on évolue dans les décors en 2D, où les coups de pinceau semblent un poil mieux contrôlés. Mais toute cette logorrhée artistique a une contrepartie, et certains ralentissements se font sentir par moments ; sans oublier les plates-formes que l'on essaie d'apercevoir pour ne pas tomber dans le vide. Des broutilles au regard du travail accompli par Ignition Entertainment, qui parvient à nous faire aimer la géométrie avec El Shaddai. Avec une telle maîtrise des formes, on se demande du coup comment les développeurs ont pu imaginer un gameplay aussi basique, même si on parvient toutefois à y déceler un semblant de profondeur. Plus concrètement, Epoch dispose de trois armes qu’il va devoir alterner pour vaincre ses adversaires : le Gale, l’Arch et le Veil. Le Gale permet d’atteindre les ennemis à distance, alors qu’il faut impérativement les coller avec le Veil pour leur faire mal. Quant à l’Arch, il représente un excellent compromis entre vitesse d’exécution et puissance des attaques.
Les Dix Commandements
Puisqu’il faut bien offrir un peu de challenge, Enoch devra trouver l’arme la plus efficace face à telle ou telle créature, sachant que les combats ne se déroulent quasiment jamais en un contre un. Les affrontements dans El Shaddai : Ascension of the Metatron prennent alors une tournure un peu plus stratégique, puisqu’il faut généralement s’occuper en priorité des traîtres qui s’amusent à balancer des missiles dès que l’on a le dos tourné, avant de s’attaquer au reste de la bande. On n’en démord pas, le système de combat d’El Shaddai ne fait pas fantasmer quand on a connu au moins un seul épisode de God of War dans sa vie, mais avouons tout de même que sans une connaissance parfaite des contres, on morfle sévère. Heureusement, la possibilité de faire appel à Uriel pour décupler ponctuellement la force d’Enoch, en pressant simultanément les boutons de tranche, permet de reprendre son souffle ou de porter le coup de grâce sans puiser dans ses réserves. Car Enoch a beau être un ange auréolé de la bénédiction divine, il est soumis aux mêmes règles qui régissent le monde des mortels ; enfin, presque. Car avant de sombrer définitivement dans les ténèbres, il pourra quand même renaître de ses cendres plusieurs fois en tapotant sur les gâchettes. Quelques subtilités donc pour El Shaddai : Ascension of the Metatron, mais qui ne parviennent pas à masquer cette mécanique de jeu hyper redondante : des combats qui viennent s’intercaler entre de longs couloirs de sauts et de roulades ; on a connu largement plus excitant. Maintenant, il faut reconnaître qu’avec le niveau de difficulté réglé au maximum et les phases en 2D façon Donkey Kong qui traînent dans les deux derniers chapitres du jeu, El Shaddai donne quelques sueurs froides, agace même. La faute, surtout, à un saut archaïque qui ne pardonne pas la moindre approximation. Bref, on y réfléchira à deux fois avant de lui donner le bon dieu sans confession.