Hudson Soft et Konami ont beau placarder sur la jaquette le nom, de toute façon méconnue chez nous, de Jun Suemi au art design, le fait est que Rengoku a du mal à éblouir la rétine. Si les artworks de ces androïdes particulièrement inventifs, croqués par ce grand nom de l’Heroic Fantasy japonaise, sont effectivement du plus bel effet, une fois les yeux dans le jeu on ne peut que déchanter. Sans tomber dans la bouillie de pixels façon jeu PSone de seconde zone, on est malgré tout face à quelque chose d’austère pour ne pas dire de sordide. Un androïde, vous, doté d’un ego, commence naturellement à s’interroger (mais pas trop) sur le sens de son existence et sur ses motivations. Fritz Lang (Métropolis), Stanley Kubrick (2001 : a space odyssey) ou encore Ridley Scott (Blade Runner) ont chacun apporté leur pierre à l’édifice cinématographique du robot doté d’intelligence, mais dans le jeu vidéo ce thème reste encore peu exploité. Il ne le sera d’ailleurs guère plus dans Rengoku, avec ses 20 lignes de dialogues à tout casser. Difficile également de défricher une parabole entre ce purgatoire et celui de La Divine Comédie de Dante Alghieri. Réinitialisé en bas de la tour, vous devrez gravir ses huit étages, chacun gardés par un collègue particulièrement évolué, et éliminer ainsi tous vos rivaux. On nage en pleine SF, dans ces lieux cloisonnés et clonés aléatoirement où nulle forme de vie biologique n’apparaît. Il n’existe pas davantage de motivation scénaristique, en tant qu’androïde de combat votre seul but est la survie, et bien entendu la destruction. Autant dire qu’avec un postulat si glacé et maigre, le devenir de Rengoku ne va dépendre que de son gameplay. Et c’est à partir d’ici que les opinions vont diverger.
Cogito Ergo Sum
Rengoku est sans nul doute un petit jeu, dans tous les sens du terme. La tour ne comporte que huit étages, et qui plus est vraiment courts, du moins jusqu’à l’avant-dernier. L’intérêt de Rengoku réside dans le fonctionnement offensif de votre androïde de combat. Chaque bouton de la PSP correspond à une partie du corps : carré et rond pour les bras, triangle pour la tête, croix pour l’abdomen. Les jambes sont réservées au soin ou au soutien. L’arme sélectionnée fusionne littéralement avec votre membre, de sorte que le droïde se façonne corporellement en fonction de votre armada. Bras gauche en forme de mitrailleuse, bras droit en lame tranchante et canon proéminent en prolongement naturel du crane, tout est possible. Tout est possible, mais limité, les emplacements sont initialement peu nombreux car ils nécessitent, comme tout le reste de vos caractéristiques, d’être upgradés aux terminaux de chaque étage. Et c’est ici que ça se complique. Rengoku est d’une difficulté exaspérante, dans le sens où l’on ne trouve pas assez d’élixir, cet élément correspondant aux points d’expérience d’un jeu de rôle, qu’il faut ensuite dépenser pour améliorer vos statistiques de défenses, ou votre vitalité. Sans une bonne grosse séance de level up dès le départ, autant dire que la progression sera suffisamment lente et laborieuse pour faire lâcher prise aux plus motivés. Car devoir faire du sur place pour monter ses statistiques dans un titre qui n’est pas un véritable jeu de rôle, relève de la gageure. Et pourtant, nul doute que Rengoku est un jeu pétri de bonnes intentions, mais celles-ci sont très mal mises en applications. Le cap à franchir est considérable, mais celui qui y parviendra pourrait bien, tout comme moi, finir par se prendre au jeu de la montée en puissance de façon assez surprenante. Les armes sont réellement nombreuses et variées, et on finit par prendre un réel plaisir à devenir l’entité maître dans ce microcosme cybernétique. Doté d’adversaires bien coriaces, Rengoku se permet en plus d’offrir une puissance de feu optimale mais sans se confiner à du bourrinage bête et méchant.
Dearest Katharsis
Et pourtant, en plus d’être peu attirant visuellement, Rengoku se casse également la gueule sur le plan ergonomique. Le fait de devoir revenir au terminal de l’étage pour se soigner, et s’équiper/recharger ses armes est aussi nécessaire que frustrant. Nécessaire de par l’intérêt d’une préparation méthodique, et frustrant parce que les allers-retours incessants sont un énième stratagème pour améliorer artificiellement une durée de vie déjà sabotée par un mauvais dosage de la difficulté. Sur le plan de la jouabilité ensuite, Rengoku subit lui aussi les ravages de la mauvaise croix de direction de la PSP. Déplacer son androïde se fait volontiers avec le stick analogique, mais une fois arrivé contre des adversaires coriaces, il est absolument nécessaire de maîtriser l’esquive rapide, un mouvement nettement plus aisé à réaliser avec la croix. Rengoku impose donc une logique qu’on risque de rencontrer encore bien souvent à l’avenir sur PSP, celle de l’alternance entre la croix et le stick. Un coup à prendre certes, mais un réel défaut d’ergonomie. Et enfin, last but not least, dites-vous également qu’à chaque défaite, vous recommencez non seulement en bas de la tour, ce qui est vraiment une excellente idée lorsqu’on se trouve au sixième et que chaque étage est ponctué d’un superbe temps de chargement, mais qu’en plus toutes vos armes équipées sont perdues. Mon conseil ? Reset. Ca va beaucoup plus vite.