Gamin, parmi les rêves disponibles entre pompier, explorateur, astronaute et des hybrides comme boulanger-commando, il y a pilote de robot. Mais une fois devant le conseiller d'orientation, la triste réalité éclate. Ce sera impossible mon pauvre ami. Des mots cruels qui résonnaient dans le silence de la déception jusqu'en 2002, où Capcom s'est décidé à partir en croisade contre cette injustice. De là est né Steel Battalion, simulation de mecha accompagnée de tout un poste de pilotage en kit. Un cadeau qui était aussi miraculeux que difficile, sombrant rapidement dans les archives de l'histoire vidéoludique. Nostalgique de ses années de beaux gestes, Capcom a ressorti du hangar sa licence pour l'adapter à une technologie de pointe, Kinect. Si vous avez saisi une certaine ironie dans cette phrase, vous avez déjà une idée de la conclusion de ce test de Steel Battalion : Heavy Armor.

Nouvelle tentative d'amener Kinect dans le domaine du jeu "sérieux" pour les hommes qui aiment quand l'air sent l'explosion et l'essence, Steel Battalion : Heavy Armor conserve la même ligne de mire que son prédécesseur : travailler l'immersion. C'est-à-dire soigner le rendu de la guerre et la complexité du tableau de bord, afin de plonger le joueur dans l'atmosphère oppressante d'un cercueil ambulant de métal, à la docilité très relative. Dans les deux cas, tout fonctionne parfaitement.
Enfermé dans un cockpit avec un angle de vue très réduit, le joueur est surtout confronté aux signes d'agitation extérieurs passent par un sound-design impeccable. Les balles fusent sur le blindage, les explosions dégagent une réelle force, la radio crépite des ordres affolés, les coéquipiers se plaignent ou encouragent et cet ensemble de sons crée une ambiance de chaos total qui colle à ce qui se passe derrière les quelques centimètres de votre carlingue. La guerre se rapproche d'ailleurs un peu plus lors des chocs majeurs qui brisent la vitre votre poste de commande ou endommage gravement le mecha, jusqu'à le rendre incontrôlable. Une recherche de puissance dans les échanges qui donne un cachet très Battlefield / Call of Duty à un Steel Battalion : Heavy Armor qui va même plus loin que ces derniers dans les scènes chocs.
Rien n'est épargné au joueur qui est placé en face des horreurs et du cynisme de la guerre, dans un script qui ne manque pas de scènes fraternelles pour désamorcer la tension, mais qui contient tous les éléments nécessaires à un gros coup de déprime. Propre techniquement, avec des décors variés et un cockpit bien détaillé à l'inspiration steam-punk un peu rouillé, le jeu de From Software avait de quoi partir du bon pied. Ce qui est la moindre des choses pour un Vertical Tank.
Mecha tombe

Transposer l'ensemble des commandes d'un mecha sur un périphérique, même de taille respectable, relevait déjà d'un sacré challenge, qui au regard du résultat de l'équivalent Kinect, doit presque rappeler de bons souvenirs aux concepteurs d'époque. Dématérialisation totale, cette console de direction est désormais directement affiché à l'écran, dans le cockpit. Les interactions se font donc de manière directe, en pressant tel ou tel bouton, en actionnant tel ou tel levier. Une idée intéressante dans l'absolu qui souffre d'un immense problème, celui de ne pas avoir été pensée pour les errances de Kinect.
Loin d'être un modèle de précision, le bidule à reconnaissance de mouvements de Microsoft est même assez limité lorsqu'il s'agit de retrouver dans l'espace des actions amples et rapides. Autant dire que pour prendre la place d'un pauvre soldat coincé dans un habitacle de 4 m² sous le feu ennemi, et donc passablement vif dans l'enchaînement des commandes, ce n'était peut-être pas la meilleure solution. Outre le fait de rater une fois sur deux les interrupteurs les plus petits, le joueur passe son temps à essayer de ne pas déclencher les essuies-glace en voulant tirer une salve de missiles. Ou l'inverse, ce qui est plus dangereux. Les différents éléments interactifs du cockpit ont une fâcheuse tendance à arrêter le mouvement afin de faciliter leur visibilité et surtout de contrecarrer l'imprécision de Kinect. Une pensée louable qui se traduit pourtant par des actes à l'insu du joueur. Tout le temps. A tel point qu'il est facile, pour un joueur un peu faible psychologiquement, de céder à la panique et de se cacher sous une table en pleurant.
Accéder à la pompe à air lorsque votre mecha se remplit de fumée passe presque une fois sur deux par l'étape "je descends le périscope" ou "j'amorce l'autodestruction", le pire étant le "je fais coucou à mon pote derrière". Car pour faire le tour de l'équipe, il est nécessaire de faire un geste de la main vers la gauche ou la droite, action qui sera effectuée par erreur tout au long du jeu.
A tel point qu'il est facile, pour un joueur un peu faible psychologiquement, de céder à la panique et de se cacher sous une table en pleurant."

Autre mauvais choix, le basculement vers la vitre du Vertical Tank et donc l'accès à une vue jouable, se fait en tendant les bras vers l'écran. Ce qui ne marche quasiment jamais du premier coup et oblige à se replacer sans cesse, dans l'espoir d'enfin pouvoir se défendre correctement.
Car si le périscope donne la possibilité d'aligner les ennemis avec une précision bien plus grande qu'en vue "vitre", la mobilité est réduite à quelques pas laborieux et il ne faut pas s'étonner de recevoir des roquettes d'à peu près tous les côtés. Et ce même dans la quasi indifférence générale des ennemis, qui n'ouvrent le feu qu'à une distance réduite. La seule vue agréable est donc la moins efficace et il y est impossible d'avoir accès aux éléments vitaux du tank, obligeant à faire des pompes dans le vent, le tout assis bien droit sur son siège pour éviter les 15 minutes de recalibrage en cas de décrochage de Kinect. Manette en main qui plus est, le gameplay demandant de jongler entre le virtuel et le réel. Une association bâtarde à l'image du ressenti face à Steel Battalion : Heavy Armor, brillant dans sa capacité à mettre le nez dans la guerre, mais incapable de fournir au joueur une expérience de jeu correcte. Pourtant c'était un beau métier pilote de mécha...