Suite à l'invitation de la princesse Peach, Mario et Luigi se rendent à l'OrigamiFest, un prometteur festival d'origami situé à Toadville. Mais à peine arrivés, nos deux compères se rendent compte que les rues sont vides et que Peach a une tête vraiment bizarre. Au lieu d'être toute plate comme tout "paper personnage" qui se respecte, elle semble faite de reliefs et de plis. Pour une fois, ce n'est pas Bowser qui est à blâmer, mais Olly, l'autoproclamé roi Origami qui cherche à "origamiser" tous les habitants de la ville. Suite à une première anicroche avec Mario, Olly kidnappe non seulement Peach (on ne change pas une recette qui gagne…) mais également son château ! Celui-ci se retrouve alors perché en haut d'une montagne, enserré par des serpentins géants sur la trace desquels Mario et Olivia, la sœur du roi Olly, partent aussitôt. Luigi fait quant à lui cavalier seul et sort du champ, mais que ses fans se rassurent, les deux héros principaux auront l'occasion de croiser la route du plombier vert à plusieurs reprises.
Si ce scénario reste basique (on a l'habitude avec les Mario), il a le mérite de changer quelques conventions puisque la situation n'oppose plus Mario et ses amis aux sbires de Bowser, mais les personnages de papier plats aux origuerriers. Une fois dépliés d'un bon coup de marteau sur la tête, les goombas, maskass et autres koopas se retrouvent donc dans le camp des gentils. Les dialogues n'hésitent d'ailleurs pas à évoquer régulièrement cette situation insolite. La direction artistique va évidemment de pair avec cet univers de papier et, si elle est globalement satisfaisante, elle souffle tout de même un peu le chaud et le froid. Les personnages 2D typiques de la série sont toujours aussi séduisants, le contour blanc qui les délimite leur donnant l'aspect de stickers tout mignons. Et si les versions pliées rendent joliment hommage à l'art de l'origami, le mélange des deux semble hélas un peu fouillis. Surtout qu'il faut rajouter dans l'équation des décors en papier qui ont leur propre style, certains ennemis particuliers en papier mâché, et on note même, de manière difficilement compréhensible, la présence de quelques textures photoréalistes ici ou là. Sans être foncièrement désagréable à l’œil, le mélange de tous ces styles nous semble tout de même manquer un peu trop de cohérence.
PAS PEUR MARIO
Faisons fi de ces considérations esthétiques, et intéressons-nous maintenant au gameplay ! Globalement, ce dernier mélange exploration libre et combats au tour par tour. Assez atypiques, les affrontements se déroulent sur un terrain circulaire semblable à une cible de fléchettes. Mario est situé au centre, tandis que les ennemis viennent se placer de manière désordonnée sur les différentes cases. Avant de les frapper, Mario dispose de quelques secondes et d'un nombre de déplacements limité pour faire pivoter les anneaux et coulisser les sections transversales. Le but de la manœuvre ? Aligner les ennemis afin de pouvoir leur sauter dessus en ligne droite, ou les regrouper près du centre afin de leur infliger un coup de marteau collectif. En cas de disposition réussie (c'est à dire si tous les ennemis sont alignés ou regroupés), les dégâts sont automatiquement augmentés de 50%. Et on peut encore leur retirer quelques points de vie supplémentaires en appliquant le bon timing aux coups. Ce système mêle donc à la fois action et réflexion façon puzzle game. A ce titre, il s'avère particulièrement plaisant.
En revanche, il tient assez mal la longueur. Malgré la présence de diverses armes (marteau brillant plus puissant, bottes de fer pour sauter sans risque sur les créatures munies de pointes ou de pinces, fleurs de feu permettant de balancer des boules enflammées sur les rangées d'ennemis, queue de raton laveur pour infliger une balayette aux groupes…), on applique toujours à peu près la même recette, et un sentiment de répétition voit donc assez vite le jour. Heureusement, les combats contre les boss se déroulent différemment. Si le terrain "cible de fléchettes" répond toujours à l'appel, c'est désormais le boss qui est situé au centre. Mario doit alors pivoter et coulisser les panneaux de manière à placer correctement : des flèches directionnelles qu'il devra suivre, des cases lui permettant d'attaquer, et des bonus à ramasser (vie, action supplémentaire, déplacement supplémentaire, enveloppe donnant des informations sur le comportement du boss…). Si le jeu s'avère globalement facile, la complexité monte clairement d'un cran lors de ces combats particuliers.
MARIO A LE BRAS LONG
L'exploration donne accès à quelques éléments de gameplay supplémentaires, comme le fait de pouvoir écraser les ennemis les plus faibles d'un coup de marteau sans déclencher de combat au tour par tour, ou encore la possibilité de dégainer les bras en papier accordéon de Mario, qui peut alors atteindre des endroits situés en hauteur afin de décoller une partie du décor par exemple. C'est rigolo, mais l'utilisation de ces "bras multi-pliés" (contrôlables en "motion gaming" si on le souhaite) est scriptée à l'extrême, puisqu'elle ne peut avoir lieu que sur des sceaux de pouvoir, qui apparaissent non seulement à des endroits précis mais également à des moments précis. Ce gimmick sympathique paraît donc un peu sous-exploité. D'une manière générale, le jeu manque d'un petit grain de folie, et de trouvailles de gameplay en rapport avec le papier qui soit réellement surprenantes. Mais au bout de six épisodes, on comprend qu'il soit difficile de totalement se renouveler. On notera tout de même la présence de très nombreux trous béants dans les décors, que Mario peut reboucher en lançant des confettis. Les amateurs de 100 % pourront donc s'amuser à retrouver et colmater l'ensemble de ces brèches. Le jeu propose d'ailleurs beaucoup d'éléments à collectionner, qu'il s'agisse de mini-trésors à ramasser dans des coffres généralement bien cachés, de blocs "point d'interrogation" à frapper d'un coup de tête, ou encore de Toads à retrouver dans les décors et à déplier d'un bon coup de marteau bien placé. Ces derniers se comptent par centaines et, du fait de leur "origamisation", peuvent prendre la forme d'à peu près tout et n'importe quoi (fleurs, cafards, fanions, sauterelles, chiens, œufs au plat…). Subtilité supplémentaire : les Toads retrouvés peuvent ensuite être appelés lors des combats au tour par tour en l'échange de pièces de monnaie. Ils aident alors automatiquement au repositionnement des ennemis, leur enlèvent quelques points de vie, ou redonnent de la vie à Mario.
Contrairement à d'autres jeux remplis de "collectibles", la présence de tous ces éléments cachés s'avère plutôt agréable, et participe à la très bonne durée de vie de ce Paper Mario (comptez environ trente heures pour en voir le bout). De plus, on ne sent jamais trop perdu, car il est possible d'appeler Olivia à n'importe quel moment, afin qu'elle nous offre un précieux conseil sur l'objectif en cours et le moyen d'y parvenir. Ce personnage est d'autant plus plaisant que l'écriture générale est de très bonne qualité. Les dialogues et les situations sont souvent très drôles, multiplient les références à l'univers de Mario ou à d'autres jeux vidéo, et n'hésitent pas à briser le quatrième mur à l'occasion. Cet humour est étonnamment très efficace et trouve toujours le ton juste. Comble du bonheur, la localisation s'avère de haute volée, comme le prouve la présence régulière de jeux de mots franco-français, qui sont tout sauf le fruit d'une traduction bêtement littérale ("c'est lui le patronc" en parlant d'un arbre, "se plier en quatre", "faire plier l'ennemi", et d'autres bien meilleurs encore).