Les voies des services de marketing et de localisation étant impénétrables, ce jeu qui porte la mention Art of Murder : Les Cartes du Destin sur la jaquette se retrouve nommé Art of Murder : Les Cartes de la Destinée dans le menu principal et les raccourcis de lancement. Une incohérence qui laisse craindre le pire sur la traduction française, à tort heureusement. Hormis quelques fautes de frappe et une ou deux phrases mal interprétées, les sous-titres sont globalement de bonne qualité. Et le choix de conserver les voix anglaises originales nous évite de subir un médiocre doublage en français. Rappelons d'ailleurs que, comme son prédécesseur Art of Murder : La Traque du Marionnettiste, le jeu permet de zapper d'un simple clic les séquences audio mais interdit cette manœuvre lors des premiers mots prononcés, évitant ainsi au joueur un peu trop empressé de passer un dialogue qu'il n'aurait physiquement pas eu le temps de lire. Dans le même ordre d'idées, les développeurs n'ont pas oublié la gestion du double-clic, qui transforme la lente marche de l'héroïne en course rapide, et permet même de passer quasiment instantanément d'un lieu à un autre. Les allers et retours dans les différents décors ne sont donc jamais pénibles, d'autant moins que la représentation graphique des scènes est généralement très plaisante. Hormis quelques endroits un peu trop génériques (entrepôt, usine, atelier...), la plupart des décors flattent la rétine. Si d'un point de vue purement artistique, la qualité n'atteint jamais celle des peintures virtuelles du récent et sublime Black Mirror II, le mélange entre 3D précalculée et 3D temps réel fonctionne plutôt bien. La fusion souvent imperceptible des deux techniques autorise par exemple un effet de zoom lors des séquences de dialogues, ce qui fluidifie leur transition avec les écrans interactifs. Comme c'est le cas dans la plupart des jeux d'aventure modernes, ces derniers bénéficient d'ailleurs d'une fonction d'affichage des zones interactives, bien utile pour repérer les éléments les plus minuscules et les mieux intégrés dans les décors.
La perfection n'est pas de ce monde
Avant d'évoquer le fond de l'aventure, continuons le chapitre technique avec la représentation 3D des objets de l'inventaire. La possibilité de les faire tourner sur eux-mêmes renforce légèrement l'immersion et permet surtout d'enrichir les énigmes, certaines informations cruciales pouvant être dissimulées au dos de la face initialement visible. En revanche, difficile de ne pas pester contre l'aspect un peu kitch du curseur de souris, qui prend inutilement la forme d'une souris à deux boutons. A l'usage l'interface dévoile également un autre problème, moins cosmétique et nettement plus gênant, qui concerne l'association des objets de l'inventaire. Dans certains cas, l'ordre dans lesquels on les combine à son importance. Associer une burette vide à un bidon d'huile ne donne par exemple aucun résultat positif, il faut impérativement sélectionner le bidon en premier puis cliquer sur la burette. De même, il n'est pas possible de mettre une pièce à conviction dans un sachet en plastique, en appliquant le deuxième sur la première. Cet aspect inutilement pointilleux confine à la rigidité et nuit à plusieurs reprises à la fluidité de la progression du joueur. Quelques énigmes barbantes ont également un effet similaire. On pense notamment aux phases de recherche dans les bureaux du FBI. Scanner les deux faces de chaque pièce à conviction n'a rien de passionnant. Quant au système de correspondance dans la base de données criminelle, il s'avère carrément pénible. Chaque objet se voit attribué un certain nombre de zones d'identification, qu'il faut ensuite sélectionner en partie car les choisir toutes ralentit trop le système du FBI. Pour trouver la bonne combinaison qui permettra de mettre en relation la pièce à conviction avec des affaires précédentes, il faut donc faire bêtement différents essais jusqu'à tomber sur le bon résultat, aucun indice ni justification logique ne permettant de procéder autrement que par tâtonnements. Autre erreur flagrante de game design : une séquence dans des marais infestés d'alligators, que l'héroïne doit traverser en sautant de poteaux en poteaux. Mais certains se dérobent sous elle, la précipitant alors vers un funeste destin. Pour le joueur, l'action consiste donc à mourir encore et encore afin de déterminer les endroits à éviter lors de sa prochaine tentative. Heureusement, toutes les énigmes ne sont pas de cet acabit ! Certaines se résolvent facilement et avec plaisir, tandis que d'autres se montrent très ardues, mais restent logiques et cohérentes. Pour terminer le jeu il faut donc mettre en branle tous ses neurones , ce qui assure d'une bonne durée de vie. Le scénario reste très classique dans son ensemble, puisqu'il met l'enquêtrice du FBI aux prises avec un tueur en série, mais se laisse agréablement parcourir. L'ambiance rappelle celle des séries télévisées modernes et se voit renforcée par une musique légèrement angoissante, et donc de bon aloi. Entre deux passages un peu frustrants, on passe au final d'assez bons moments. Sans atteindre des sommets, la série est donc en nette progression, et ce nouvel épisode constitue un choix possible pour l'amateur de jeux d'aventure en mal de nouveautés.