
Animé par un scénario aussi captivant que celui de
Demon's Souls, c'est-à-dire totalement secondaire,
Dark Souls tente tout de même de raconter l'histoire d'une nation déchirée par le mal, où les habitants n'errent désormais que sous l'apparence de goules, la mort étant un destin presque appréciable. Quelques êtres humains se terrent derrière de faibles murs et idéologies religieuses, mais la calamité pénètre tellement chaque centimètre carré de ce monde qu'ils semblent déjà n'être que de simples souvenirs. Une ambiance oppressive, presque poisseuse, qui s'accroche au joueur à chaque pas, à chaque rencontre. Un chevalier ? Il se moque de vous. Un marchand ? Ce n'est qu'un mort-vivant avide. Un héros ? Un psychopathe en puissance. Rien ne soulage dans
Dark Souls. Outil rassurant dans un univers angoissant, même le dialogue est ici gorgé de noirceur. Les rares mots que le joueur échange avec ses "semblables" se finissent par des rires malades et des prédictions macabres qui terminent de retirer la moindre bribe de courage. Un coup supplémentaire passant par un doublage de très grande qualité, orienté fou furieux étrangement calme. Mais plus que ces lieux brumeux, trop silencieux et remplis de cadavres, c'est surtout la parano qui prend une place importante. Chaque recoin est la promesse d'un coup en traître, chaque facilité est un piège, chaque ennemi est un challenge. Dans
Dark Souls, les continus ont été remplacés par cette sentence obsédante : "vous êtes mort". Et ce n'est que le début. Vous êtes mort.
Darker than Black

Véritable suite spirituelle,
Dark Souls emprunte de nombreux éléments de
Demon's Souls, comme les indices/pièges marqués au sol par les joueurs, la conservation des items après la mort, à défaut des âmes, qui elles vous attendront bien sagement à l'endroit de votre défaite. Il vous faudra revenir les chercher en essayant de ne pas vous faire décapiter entre-temps, ce qui causerait la perte définitive de votre pécule. Un rouage connu des amateurs donc, qui donne une raison de ne pas tout lâcher en hurlant après sa défaite. Une sorte de système de carotte au bout du bâton, dans lequel ce dernier servirait aussi bien à donner des coups dans le dos qu'à tenir la récompense à distance. Élément extrêmement important, les âmes sont la base de tout ce qui peut vous aider, vous permettant non seulement de monter en niveau mais également de réparer votre équipement ou simplement faire vos emplettes. Difficiles à gagner, s'engrangeant en petit nombre à chaque victoire contre un adversaire, elles sont surtout difficiles à conserver. Il faudra sans cesse choisir entre l'augmentation d'une caractéristique à chaque montée de niveau et l'amélioration de son duo arme/armure auprès de forgeron perdus dans la nature. C'est là l'une des grandes nouveautés de
Dark Souls, un univers ouvert à fouiller de fond en comble pour trouver des possibilités habituellement à disposition directe du joueur. Alors que
Demon's Souls offrait un sas de décompression avec le Nexus, hub sans aucune menace,
Dark Souls s'acharne à créer une sensation de danger constante. Et ce malgré la présence de feux de camps qui ressemblent un peu à ceux présents dans
The Witcher. Seule source de chaleur, ces endroits sont paradoxalement rassurants et base de la souffrance du joueur. S'asseoir au coin des braises est l'assurance de récupérer toute sa vie et, si votre console est connectée, d'apercevoir les images fugaces des autres joueurs également en repos. L'opportunité, pendant quelques instants, de quitter son aventure
solitaire. La contrepartie étant que cette halte ranime tous les ennemis vaincus, mis à part les boss et les adversaires spéciaux Cette excellente idée crée immédiatement une inquiétude quant au choix de se restaurer avec le risque de devoir encore se battre férocement contre des hordes de bestioles grouillantes ou de continuer un rush le plus long possible afin d'avancer. Au risque de se faire éliminer et de ne revenir qu'au dernier feu de camp ravivé. Malgré tout, le piétinement s'impose vite comme une solution viable, tant la difficulté se montre intraitable. Vous êtes mort.
L'armée des ombres

Avec sa musique calme et son ambiance moins oppressante que tout ce qui l'entoure, un peu à l'image des forges de
Vagrant Story, le feu est également l'endroit où vous pouvez redevenir humain, en sacrifiant un objet nommé humanité. Uniquement récupérables sur les boss, certains ennemis retors et dans des endroits très bien cachés, cet item est l'un des plus précieux de
Dark Souls. Retrouver son enveloppe originelle ouvre bien davantage les pistes de jeu avec l'une des
features les plus marquantes de l'expérience
Demon's Souls, l'interaction entre les mondes. Il vous est possible soit d'envahir la partie d'un autre joueur dans le but de le tuer et ainsi lui soutirer une précieuse humanité, soit de crier un appel à l'aide en inscrivant un message au sol, équivalents respectifs du principe du Black et du Blue
Phantom de
Demon's Souls. La tension naturelle du jeu monte alors d'un cran en sachant qu'il peut arriver de se faire embrocher alors à peine remis d'un combat éprouvant. Encore une fois très exigeant, le système de combat implique des duels épiques, tant les ennemis tirent parti de la moindre faiblesse. Des situations qui se compliquent très rapidement, à cause d'une jauge de
stamina qui se vide comme une mauvaise blessure au moindre coup paré et à chaque estocade donnée. Il est donc très fréquent de se retrouver démuni en cas de prise de confiance ce qui ne pardonne pas face aux boss complètement cheatés du jeu. Impressionnants, ils ont tous leur point faible et un pattern précis qu'il faut observer durant de longues minutes et se remémorer une fois mort, pendant tout le chemin nécessaire pour revenir à leur antre. Une progression par à-coups brutaux, qui énerve et fascine, qui donne envie d'avancer pour soulager son ego et se prouver que c'est possible. Le problème est que cette gymnastique peut vite devenir épuisante,
From Software étant sans doute allé trop loin dans la souffrance. Malgré sa difficulté
Demon's Souls donnait un petit espoir par fragments alors que
Dark Souls enterre sans arrêt la motivation. Limitant drastiquement les sorts pour les magiciens, n'offrant que 5 bouteilles d'Estus pour se soigner – renouvelées auprès des feux –
Dark Souls pousse au danger, oblige le corps-à-corps. Une entreprise de démolition ludique qui passe aussi par un lock toujours aussi lâche et surtout par des problèmes de collision parfois fatals. Terrible et addictif,
Dark Souls risque à tout moment de faire lâcher prise au joueur par sa propension à l'absence de concession maladive et sa répétition. Accrocher à
Dark Souls surtout est un choix en connaissance de cause. Vous êtes mort.
TEST VIDÉO DARK SOULS